dimanche 9 septembre 2012

le plan "Voisin" postal



Bon, le dire tout net, c'est exceptionnellement inattendu.
Il s'agit bien d'une carte postale représentant la maquette du plan Voisin, œuvre de Le Corbusier. Regardons également le verso.



On lit donc les informations suivantes : Le Corbusier (Charles-Edouard) et Jeanneret (Pierre). La Cité d'Affaires de Paris. Plan "Voisin". Extrait du film "Bâtir".
On note également : (courtesy of M. Le Corbusier) (Cliché Marius Gravot)
Prenons les choses dans l'ordre. Le Corbusier, oui, c'est  bien documenté, on connaît bien ce plan ambitieux et fou d'un Paris partiellement dessiné à la gloire de l'automobile et dont l'architecte chercha des financements auprès des constructeurs d'automobiles. Le constructeur Voisin qui faisait d'ailleurs d'incroyablement belles automobiles a répondu favorablement d'où le titre de plan "Voisin". Corbu aimait ses automobiles et les clichés où l'on trouve une Voisin devant ses constructions sont connus. On pourra aussi remarquer une certaine filiation entre la voiture minimum de Le Corbusier et la voiture Voisin économique qui fut, elle, produite.
Le terme Cité d'Affaires me semble plus étrange car, à ma connaissance ce terme est moins usité. Pour ce qui est du film dont serait tirée l'image (?) la maquette (?) le projet (?) c'est plus difficile... On trouve sur Youtube cet extrait très court:



Et cela ne nous permet pas d'en savoir beaucoup plus sur cette carte postale. Mais... pourquoi depuis un film éditer une carte postale ?
L'éditeur est Fernand Nathan, donc il ne s'agit pas d'une petite édition cachée mais certainement d'une édition plus ample, plus commerciale... En plus on remarque également une série de code 1re- S.-XIII. N°12 ... une première série 23 dont cette carte serait la douzième ? Une série sur l'habitat moderne ? Très étrange. Marius Gravot comme photographe semble bien référencé et connu et il a travaillé beaucoup pour Le Corbusier. On a même la surprise de trouver une photographie de la Fondation suisse avec... une voiture Voisin ! On peut aussi, si on le désire voir le travail d'Alain Bublex sur ce plan Voisin ou encore se promener dedans.



Reste le mystère sur cette édition d'une carte postale. Il faut bien aussi parfois aimer ce mystère... Si seulement nous avions pu avoir cet héritage à Paris dans cette pureté abstraite, irréelle et farceuse.




vendredi 7 septembre 2012

Ginsberg à la barre

C'est vraiment Hard. Vraiment French. Mais ce n'est plus désormais que des cartes postales et des souvenirs. La Cité Pierre Collinet de Meaux a disparu sous la "culture de la démolition", ce mal tout aussi français que le hard french.
Faire de la politique du logement (à gauche comme à droite) c'est faire une politique de la démolition. Car cela se voit, cela est spectaculaire et surtout cela ne résout rien.
Que voulez-vous... j'aime cette architecture de Jean Ginsberg. Je n'y peux rien, j'ai été élevé comme ça en passant par la peinture moderniste et De Stijl, en passant par Donald Judd et les minimalistes américains. Et puis, doucement, tranquillement, aimer les structures pour ce qu'elles sont aussi des espaces, aimer l'architecture comme on aime la sculpture : gratuitement, hors de la trivialité d'usage.
Je sais que ce pas sur le côté est souvent agaçant et difficile. Mais j'aime la Cité Pierre Collinet.
Et sa force d'implacabilité qui plaît, sa grille déterminée, sa rythmicité appuyée.
Dans un espace extrêmement ouvert, certainement l'une des seules vraies victoires et héritages de la modernité, ces immeubles sont bien des barres. Elles barrent et on les habite. On habite des falaises construites. Je le reconnais ce n'est pas simple. Il fallait vouloir habiter une topographie. Il y a pourtant de vraies qualités à cette esthétique. Celle du point de vue, des visées. Au bas, le regard est arrêté par des écrans brutaux et fermes, pureté abstraite. Au pied, l'œil monte sur les façades fuyantes comme un paysage de Superstudio, ce qu'a très bien vu Nicolas Moulin. Des paysages horizontaux basculés et vierges, vides, cités inconnues. Dedans, le regard reconnaît comme un miroir la barre d'en face et la hauteur parfois très grande permet l'allègement de l'ensemble. Presque un vol.
Alors laissez-moi là devant mes images. Laissez-moi croire que c'est aussi une forme, que j'ai le droit d'aimer ces monstres. Ce sont eux qui ont le plus besoin d'amour, toujours.
Regardons cette forme :



Il s'agit d'une carte postale Yvon sans date ni nom de photographe et d'architecte. Seul le nom de la Cité Pierre Collinet est inscrit.
Entre le canyon des immeubles, l'œil va chercher la ville plus loin dans un fatras de couleurs mal disposées. La coloration du cliché rend en effet l'ensemble brouillon pour le lointain ! Au pied des immeubles on devine un chantier et surtout une petite construction comme un morceau témoin de celles plus grandes déjà construites. C'est étonnant... Est-ce bien là une construction témoin ? Regardez, tout est à l'identique même le toit...



Et puis comme un choc :



Plein la face. Ici on ose le mot barre. Quelle image ! Quelle architecture ! Regardez le plan d'aménagement, les circulations, l'espace au pied généreux. Mais j'aime aussi l'ombre longue qui vient de l'immeuble à gauche, ombre qui devait marquer les heures, cadran solaire puissant et sourd.








Au devant l'œil reconnaît la rigueur de la géométrie et une fois encore la coloration accentue la grille et le dessin abstrait. La fracture de l'escalier, ses diagonales soudaines sonnent comme une fissure du bloc, le lieu de son effondrement.
Bien plus proche :



Cette carte postale ne porte pas de date ni de nom d'éditeur mais elle est beaucoup plus récente. Le photographe est nommé : Bruno Sternberger. Peut-être nous dira-t-il si le milieu des années 80 est la bonne période ? Mais il nous donnera également des précisions sur l'édition de cette carte postale, sa diffusion et son origine. Il a choisi un point de vue ouvert qui là aussi révèle le potentiel d'espace de ces cités. Regardez comme les tours sont loin les unes des autres. Une richesse que, certainement, quelques promoteurs auront vue.


jeudi 6 septembre 2012

courrier du jour

Je vous dis tout, je ne vous cache rien.
Je reçois ce matin deux courrier bien différents mais tout aussi sympathiques que je veux vous faire partager.
D'abord, je reçois de la part d'Agnès Chemetov et de César Canet cette carte postale accompagnée d'une invitation pour l'exposition Chacun sa maison, de Paul Chemetov.
D'abord la carte postale :



Nous sommes à Goderville en Seine Maritime. La résidence "la Chesnaie" ouvre toute grande sa façade sur des balcons-alvéoles dessinés par Antoine George son architecte. Aucune rapport évidemment avec Monsieur Chemetov !
La carte postale Combier a bien nettoyé son ciel. C'est son travail ! Mais cette petite modernité de la campagne normande finalement si elle n'est pas spectaculaire a quelque chose de tranquille. Les amateurs d'automobiles admireront sur le parking la petite mais rare aujourd'hui Peugeot 204 cabriolet ici avec son Hard Top !



Mais regardons autre chose plus spécifiquement :



Voici donc le carton d'invitation à l'exposition Chacun sa maison, Paul Chemetov. l'exposition aura lieu à la Cité de l'Architecture et du Patrimoine du 13 septembre au 12 novembre 2012. Il vous faudra y aller ! Il me faudra y aller ! Vous savez que sur ce blog, Nous sommes sensibles au travail de Paul Chemetov et à celui de A.U.A. Allez ici, ou encore ici pour vous en souvenir.
Ne trouvez-vous pas que déjà ce carton est bien alléchant ? Cette maison ferait bien mon affaire...
Une autre maison, un autre correspondant, un autre ami :



Cette carte postale m'est envoyée par Hansjörg Schneider, un excellent artiste allemand dont je vous ai déjà parlé. Sa pratique le conduit à un regard superbe et rare sur l'architecture : une fragilité exacerbée, une tenue du dessin. Allez voir son site ! Ou retournez là.
Voyons ce que Hansjörg nous envoie. Il s'agit de la Mozin House à Liège (1957-58) par le groupe Egau, Charles Carlier, Hyacinthe Lhoest, Jules Mozin. C'est simplement... magnifique et dire que je l'ai loupée lors de notre visite de Liège ! La succession des vides et des pleins, ce jeu de retrait et de balcon, la légèreté de l'ensemble, sa transparence en font une œuvre vraiment remarquable non ? La photographie est de Francis Niffle pour les éditions Plaizier.
Merci Hansjörg pour cette belle découverte !
On retrouve le groupe EGAU dans ce très beau site l'homme et la ville mais aussi dans l'Architecture d'Aujourd'hui avec une gare et un ensemble de logements collectifs. D'abord en 1957, quelques images des logements à Liège, le quartier du champ de manœuvres. On notera que les photographies sont encore de Francis Niffle, ce qui nous permet d'affirmer que la photographie de la carte postale est un cliché d'époque d'où sa coloration. Les photos font une grande place à la construction !













Puis des images de la gare de Liège depuis le numéro de 1959 (janvier) d'Architecture d'Aujourd'hui :










mardi 4 septembre 2012

les métropolitains sont à l'arrêt

Voici que nous n'entendrons plus la voix de Monsieur Chaslin à la radio.
Me voici dépité.
Perdu. Comme dans un réseau du métro sans métropolitain.
Alors, je me suis demandé ce qui dans ma collection pouvait résumer ce que Monsieur Chaslin et ses émissions ont pu m'apporter et c'est énorme !
Comment résumer une voix, une tonalité sérieuse, une analyse maniant objectivité amoureuse et remise en question toujours possible ?
Comment dire la capacité de Monsieur Chaslin à nous faire VOIR ce que l'on ENTEND ?
Je voulais quelque chose de modeste mais de beau, quelque chose de moderne mais de disparu, quelque chose d'un peu oublié mais qui n'a pas démérité. Et comme un clin d'œil final et nostalgique au titre de l'émission et à sa densité de réseaux (du savoir), je trouve cette toute petite chose :



Cette carte postale des éditions Chantal nous montre le métro régional (R.E.R.). En haut, les quais de la station "Charles de Gaulle-Etoile" et en bas, des détails de la station "Auber". Regardons bien l'un des détails...



On y voit des sphères, des boules colorées coupées et tranchées net. C'est pop, c'est joyeux, cela sans doute construit une sorte de village entre celui des Schtroumpfs et des Barbapapas. Cela est bien dans le ton de cette époque fruitée, French Fresh Delight, qui voudrait par la couleur et les formes simples donner un sentiment plus serein à ce métro, ce R.E.R. Et cela fonctionne bien.
On trouve dans notre guide fétiche, celui de Dominique Amouroux des informations nécessaires. Et on retrouve même nos sphères derrière les barrières du métro. On remarquera que Monsieur Amouroux reprend le terme de "décontraction" pour le visiteur. On trouve aussi les noms des architectes concernés par cet aménagement de la station Auber et il y a du beau monde ! Monsieur Wogenscky comme architecte et messieurs Richard et Monpoix pour l'architecture intérieure donc c'est bien à ces derniers que nous devons ces bulles de couleur.













































































Mais qui me dira ce que cette "chose" fait accrochée au plafond ? Quel est son rôle ? Luminaire ? On remarquera également la très belle photographie noir et blanc d'un homme seul dans le couloir du R.E.R.



Alors, cela ne suffit pas bien sûr à remercier Monsieur Chaslin. Cela ne suffit pas à payer la dette. Mais c'est un petit signe amical et respectueux. Merci Monsieur Chaslin. Nous, nous continuerons sans vous à tenter de comprendre les parpaings. Bien à vous.


lundi 3 septembre 2012

Marie dans la lumière

Pourquoi donc ne pas encore parler un peu de Le Corbusier ?
Voici pour ce faire quelques nouveautés sur Ronchamp qui seront accompagnées de quelques pages du très beau livre offert par Marc Hamandjian à votre serviteur. Merci Marc, merci.
Quand l'amitié rejoint la beauté architecturale... et même un peu de spiritualité religieuse (si si un peu...) on ne devrait que pouvoir se réjouir.
depuis dehors :



Ces deux cartes postales ont une particularité étonnante dans la matière même du papier photographique qui possède un grain très marqué. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit de "vraies photographies". La première de ces photographies est de J. Falke, Francfort et la seconde est de Silvester, Lörrach. La première porte le numéro 57 ce qui laisse penser à au moins... 57 images et cartes postales de cette série !
On notera pour ces deux photographies une grande qualité d'équilibre du cadrage et du tirage. C'est doux, juste, sans effet mais subtilement bien fait pour mettre d'abord en avant la construction. La silhouette du personnage de dos donne l'échelle. Serait-ce Silvester photographié par J. Falke ? Les cartes nomment l'architecte mais ne sont pas datées.


























En 1983 :



Une "vraie" carte postale Combier. La Chapelle est encadrée de verdure, le ciel se doit d'être bleu et le soleil écrase un peu l'ensemble dont les ombres elles-même bleuissent. Un vrai cliché.
C'est un peu comme si on découvrait au détour d'un chemin la Chapelle surgissante. Retrouvons exactement cette façade depuis l'intérieur :



Cette autre carte postale Combier nous offre un détail des vitraux pris dans les meurtrières creusées dans l'épaisseur superbe des murs blanchis de crépi généreux. La lumière brûle un rien les vitraux et cela est beau cette lumière puissante. Les flammes des bougies ont bien du mal à combattre celle-ci mais ce n'est pas leur rôle. La lumière extérieure est une présence avérée, celle des cierges est une lumière souhaitée... espérée. On pourrait dire que finalement l'une acquiesce à l'autre.
La preuve :



Cette superbe image est une carte postale des éditions Guy Janin. La carte est imprimée en Espagne !
La lumière ici est plus chaude, orangée. Le point de vue est celui du croyant, du visiteur qui s'assoit sur les bancs. Il vise ainsi le nom de Marie. Marie dans la lumière. Celle du dehors qui traverse son nom et celle du dedans apportée par le photographe. Regardez bien... On devine les lampes et les câbles au pied des bancs !
C'est aussi ce qui rend le crépi intérieur si fort à ses ombres et qui durcit les volumes. C'est dramatique comme effet. Mais j'aime, que voulez-vous, qu'ainsi pris entre deux lumières, le nom de Marie s'évanouisse doucement. C'est à son image et celle de son culte. A trop vouloir la voir, elle disparaît simplement. C'est elle qui doit éclairer.
Il y a donc dans ce trop plein de lumière du photographe comme un trop plein d'hommage. Comme une dévotion embarrassante mais tendre.





Voici Le livre. Il s'appelle simplement Ronchamp, le texte est de Robert Th. Stoll et les photographies sont de Paul et Esther Merkle. C'est une édition Desclée de Brouwer de 1958 dont la superbe maquette sur format carré est d'Emile Ruder. L'ensemble est imprimé chez nos amis suisses qui savent y faire...