lundi 20 février 2012

Dessau Grautag

Depuis Dessau, deux cartes postales.
L'une pourrait être très banale, commune, ennuyeuse.
L'autre est sans doute l'une des plus étonnantes (mais finalement attendue) de cette collection.
La première :



Expédiée en 1973, cette multi-vues nous propose plusieurs aspects de la ville. Je me plais à penser que Nicolas Moulin les nommerait "Grautag" !
Une chaussée sur un pont, du logement social, une place un rien vide, un centre commercial devraient réjouir notre ami artiste.
En 73, nous sommes encore en R.D.A... Je vous fais profiter de l'ensemble sous agrandissement cela accentuera encore l'effet "Grautag" !





Mais... mais nous sommes à Dessau... vous me voyez venir ? Allez... Dessau...
Oui !



Voici la seule carte postale de ma collection montrant le Bauhaus !
Certes c'est un peu loin, certes c'est peu lisible la modernité depuis cette image ! Pourtant il s'agit bien de l'école d'art la plus célèbre de la modernité architecturale.
La photographie est signée de Melzer pour Planet Verlag (éditeur) à Berlin. La carte postale est nommée Bauhausplatz, simplement. D'ici rien de révolutionnaire, un bâtiment administratif dans un espace urbain vraiment d'une grande banalité. Difficile de lire la modernité à tel point que je n'ai reconnu le lieu que par son intitulé !
On pourrait donc depuis cette image dire que l'architecture du Bauhaus est digérée, acceptée comme un lieu commun.
On pourrait aussi dire que sa révolution est passée et que notre œil a depuis l'habitude de cette rigueur.
On pourra une fois de plus dire que l'image (et la photographie) fonde aussi la révolution des espaces au moins autant que les espaces eux-mêmes. Représenter c'est toujours interpréter et parfois l'interprétation est prise dans des grilles d'images bien trop familières dont même les constructions les plus pointues ont du mal à sortir.
C'est aussi l'originalité du point de vue des cartes postales : elles extirpent souvent les architectures de leur déclaration de monumentalité pour les ramener à une réalité certes triviale mais aussi sans doute plus apaisée.
On remarquera aussi qu'une ville comportant ainsi l'une des plus extraordinaires constructions du siècle passé n'a pas su essaimer cet héritage et que, au moins dans sa manière de se représenter, le Bauhaus est là comme le reste dans un gris, dans un noir, dans un blanc bien normalisés.
Nous reste à remercier Nicolas Moulin pour ce qualificatif qui lui appartient et qui colle si bien aux choses vues aujourd'hui : Grautag.
N'oublions pas non plus de rappeler que le Bauhaus est l'œuvre de Gropius.