Parfois gigantesques, parfois plus modestes, les œuvres de Calder se prennent parfois pour des lieux, des espaces que les corps des piétons et des visiteurs doivent faire vivre. Comme une petite broche, un petit bijou posé sur l'austère revers du costume moderniste, le stabile (rarement le mobile !) s'amuse de sa proximité matérialiste avec les structures des tours internationales. On devine du métal plié, boulonné, découpé comme un échantillon tordu génialement. Comme si, avec le reste du métal, inutile à la structure de la construction à la fin du chantier, le sculpteur avait chalumeau à la main découpé et soudé une fantaisie joyeuse pour en orner les entrées.
Le dessin en est toujours parfait, l'échelle aussi et on verra que ce jeu amuse beaucoup les photographes de cartes postales qui y trouvent une animation bien... stabilisée.
Il fallait toujours, à une certaine époque, une sculpture moderne pour affirmer la modernité de l'architecture. Les œuvres atterrissaient là, un rien par hasard, un rien comme un signal, un rien comme une identité même. Aujourd'hui le syndrome moderne est passé sur les ronds-points qui savent sous le goût parfait de nos élus locaux nous offrir le magnifique catalogue des machins humoristico-débiles provenant d'un subtil mélange d'art contemporain mal acquis, de blagues potaches, ou encore des errements paysagers régionalistes à la mode de Chaumont. Il faudra vite en faire un inventaire pour mieux les détruire.
Reprenons donc vite une belle leçon de sculpture avec Calder :
Cette carte postale André nous montre bien comment la ville se représente moderne en 1977. L'éditeur dans cette vue-multiple nous affiche toutes les merveilles de l'architecture de la ville de Grenoble : palais des sports, tours, maison de la Culture, la mairie et enfin la gare avec sur son esplanade une œuvre de Calder que l'on voit parfaitement ici. Grenoble est moderne c'est certain !
Tellement moderne que l'éditeur de cette autre carte postale nomme "le Calder" directement sur l'image, comme si, toute ville moderne se devait d'avoir sa gare et son Calder !
Sur cette autre carte postale visant bien plus la gare, le photographe des éditions André ne peut s'empêcher de cadrer à la limite droite de l'image le-dit Stabile même s'il vise bien plus la gare.
Plus équilibré :
Cette autre carte postale de Grenoble du même éditeur rend mieux hommage à l'œuvre du sculpteur. On remarquera comment d'ailleurs celle-ci semble enfoncée dans le sol très bien dessiné également.
De nuit :
La carte postale la Cigogne cette fois nous montre bien avec l'éclairage nocturne la structure du Stabile de Calder. On notera que les éditeurs citent bien le nom de Calder et de son Stabile.
Plus parisien :
Niché au creux du canyon des tours de la Défense, le Stabile de Calder semble bien petit ! Pourtant on le devine comme centre de cette image, comme point de visée du photographe J.E. Pinet que nous connaissons bien. Ici Mr Pinet travaille pour les éditions Abeille-cartes. La carte postale fut expédiée en 1988 par votre serviteur à sa grand-mère ! Preuve sans doute de ma constance dans le goût pour ce genre de lieu !
Rapprochons-nous...
Cette carte postale nous permet encore d'apprécier le choc entre l'architecture et la sculpture de Calder. J'aime le monolithe noir de la Tour Fiat que l'on doit aux architectes Roger Saubot et François Julien entre 1972 et 1974. Les éditions Raymon font encore merveille avec Mr Pinet leur photographe. On s'amusera aussi de la silhouette féminine tout juste au bord de l'image ainsi que de l'arbrisseau qui vient briser la part un rien abstraite de l'ensemble. Un beau cliché vraiment.
On aura remarqué qu'entre les deux cartes postales des constructions sont venues remplir le vide sur l'esplanade !
Cette incroyable et magnifique carte postale Raymon nous montre la sculpture de Calder sur le parvis de la Défense. Très précise la carte postale nomme également les trois tours à l'arrière plan : Tour Générale, Tour Crédit lyonnais, Tour Atlantique. La belle photographie est du toujours talentueux J.N. Duchâteau qui permet au Stabile de prendre entre ses doigts d'acier les belles tours modernes. Le dessin de cette sculpture et d'une grande perfection alliant des vides courbes et des pleins rouges. L'ensemble tout en étant assez brutal est comparable à des arcs-boutants floraux. Plis, soudures, découpes, jonctions et lignes fabriquent non seulement une forme pour les yeux mais également un espace, un lieu et, oui, une architecture.
Similitude américaine :
Quelle carte postale !
On notera ici sur cette édition Illinois Distributing que c'est bien le Stabile de Calder qui est mis en avant puisque c'est lui qui est titré sur le recto de la carte postale. La très belle photographie de P. Valdez nous place dans l'ombre du Dirsken Building qui est l'œuvre de Mies van de Rohe, rien de moins !
Là encore l'opposition entre l'architecture froide et subtile de Mies et la chaleur rougoyante de Calder fait merveille ! Quel étrange insecte de métal ! Voyez aussi comment cette fois l'œuvre de Calder rejoint le sol. Non pas en s'y enfonçant directement mais en prenant appui sur des petites dalles ce que je trouve vraiment moins bien qu'à la Défense. On la dirait posée au lieu d'être enfoncée dans le sol, ce qui change beaucoup. Mais quel dessin ! Quel élan graphique !
On retrouve notre Stabile à Chicago :
Cette carte postale met en opposition l'œuvre de Picasso à gauche et celle de Calder à Droite. Aero Distributing Co. parle des chefs-d'œuvre de Chicago ! Cela nous permet également de mieux voir la grille de l'immeuble de Mies van der Rohe à l'arrière plan.