Petite suite enfantine.
Rien que ce moment comme point commun aux cartes postales qui suivent. Les enfants vont animer, utiliser voire dessiner l'architecture et la ville.
Ils sont spontanés ou bien encadrés ! Ils sont les rois !
En ligne !
Dans un chemin de grue tracé au sol, dans les espaces libres des barres habitées et neuves de Creil dans l'Oise, une ligne d'enfants se tenant la main court vers le photographe de cette carte postale Combier datée de 1964.
L'image est superbe, l'architecture...
Pourtant d'une certaine manière, c'est bien là le paradoxe des lieux de ce type, offrir malgré tout un bonheur de vivre ici.
Les enfants ont cette puissance de faire de chaque espace un terrain de jeux. Ici leur signature est un jaune poussin qui habille trois d'entre eux !
Les architectes de la Cité Biondi sont Monsieur Louria de Paris et Monsieur Garnier de Creil.
Et le sable :
Là aussi, à Saint Germain-sur-Ay, les gamins s'alignent ! Ils font du toboggan une sorte de présentoir à leur jeunesse !
Qui les a arrangés de la sorte ? Eux-mêmes ou le photographe ayant trouvé cette belle idée pour animer l'image ? Les parents ne sont pas loin. D'ailleurs que vise-t-on d'autre avec cette carte postale Di Mario expédiée en 1974 ? La construction à toit mono-pente à l'arrière ? Le parc des jeux pour les enfants ? Le bonheur ? Ici, avec cette image, nous pourrions bien être à la frontière entre la photographie de l'album de famille et la carte postale.
Un chef-d'œuvre du jeu pour enfants :
Nous retrouvons ici à la Palmyre, l'ensemble du Sous-Marin du Group-Ludic que nous aimons beaucoup sur ce blog. Cette image nous le montre dans sa splendeur c'est-à-dire utilisé par les gamins. Rappelons le fonctionnement de ce sous-marin : on emprunte l'une des entrées constituées par les gros tubes blancs qui surgissent du sable et on passe sous... le terrain ! Au passage on admire alors les lumières produites par les tubes de Plexiglas et autres hublots visibles et plantés sur le sol ! On peut aussi descendre par l'échelle ici :
Voyez comme tous les regards se tournent vers ce gamin qui pose fièrement sur son échelle ! Personne ne regarde le photographe des éditions Artaud ! A n'en point douter c'est la star de cette carte postale ! On notera que celle-ci nous donne bien le nom des designers de ce jeu merveilleux et aussi le nom des architectes du très beau village de vacances "les pins de Cordouan" messieurs Villeminot et Champrit.
Vous en voulez encore ?
Toujours chez Artaud, nous voyons bien le village de vacances et aussi le Sous-Marin. Surpris dans un saut courageux, un enfant utilise et s'amuse donc de cette aire de jeu si originale. On peut d'ici, un peu mieux voir le très beau travail des architectes qui ont glissé la construction sous les pins.
Un escargot :
Cette carte postale éditée par Nouvelles Images en 1986 (déjà !) reprend une photographie célèbre de Martine Franck à la bibliothèque pour enfants de Clamart que nous avons vue ici ou ici. La photographie date, elle, de 1965.
Sans aucun doute il s'agit d'une demande de la photographe mais il doit bien y avoir aussi là, une facétie enfantine comprise et perçue par la photographe. Inutile de dire que cette image sert parfaitement l'architecture, la rend aux enfants qui semblent y trouver leur échelle... en colimaçon !
Une image géniale pour une architecture géniale de l'Atelier de Montrouge. J'imagine que chacun des enfants doit avoir quelque part dans un tiroir encore aujourd'hui cette photographie et, parfois, la sortant ils pointent de leur doigt d'adulte leur visage d'enfant.
Et chose unique sur ce blog, nous avons le témoignage de la photographe Martine Franck sur cette image. En effet dans l'excellent et très beau livre consacré à cette bibliothèque, nous pouvons lire :
Mon premier reportage dans Life
par Marine Franck
" La bibliothèque pour enfants de Clamart fut mon premier reportage publié dans Life International. C'était en 1965. Stagiaire à Time Life, je faisais mes débuts dans la photographie.
Comme j'aimais à la fois les enfants et l'architecture contemporaine, c'était un projet rêvé.
Ma première vision de la bibliothèque fut prise du quatrième étage d'un HLM. Il faut imaginer une série d'immeubles autour d'un grand espace, dans lequel s'érigeait un bâtiment relativement bas et où tout était en courbe. J'ai été séduite par l'harmonie des formes. L'intérieur était d'une clarté joyeuse et les enfants semblaient heureux, épanouis, dans ce lieu où tout avait été pensé en fonction de leurs besoins.
En tant que reporter, j'aimais laisser vivre dans leur cadre mes sujets, en l'occurence, la bibliothèque. Une des choses qui m'ont particulièrement frappée, ce fut la liberté, l'aisance avec laquelle les enfants déambulaient dans la grande salle. Tout était à portée de main, les enfants passaient d'une table à l'autre, d'un bac à livres à l'autre. je n'avais qu'à les suivre le plus discrètement possible, je n'avais guère besoin de les interroger, je voyais dans leurs regards le plaisir qu'ils prenaient à être sans surveillance apparente ; je me souviens d'un calme absolu, d'un respect des lieux. Personne ne se chamaillait ni ne s'arrachait de livres.
L'heure du conte était un moment privilégié ; les enfants se mettaient en demi-cercle autour de la conteuse ; et, à les observer derrière l'objectif, je me rendais compte combien la voix humaine peut transmettre le goût de la lecture et ouvrir l'imagination.
Au cours de ce reportage, j'ai tout de même enfreint une des règles que je m'étais imposées en tant que photographe : ne pas intervenir. (Un vieux routard de Life, Loomis Dean, qui suivait mes débuts de photographe m'avait dit : "Martine, tu sais, à Life, il faut toujours avoir une photo choc", ce qu'il appelait un opener, une image d'ouverture.) Suivant son conseil, j'ai installé les enfants dans l'escalier que j'avais soigneusement éclairé.
J'avais vraiment envie que mon reportage paraisse.
Ce n'est pas ma photographie préférée mais elle est devenue, avec le temps, une de mes photos "icônes". Elle n'a pas été choisie par le rédacteur de Life mais elle a été par la suite maintes fois utilisée, pour des couvertures de livres, des affiches, tirée en carte postale, en poster, pour des collectionneurs...
C'est bien curieux, la vie d'une image !
Je n'oublierai jamais la joie que j'ai eue à faire ce reportage."
Et nous à voir vos photographies...
Espace à lire
La bibliothèque des enfants à Clamart
Gérard Thurnauer, Geneviève Patte et Catherine Blain
Gallimard 2006
un livre superbe, une architecture superbe !