samedi 12 novembre 2011

Pierre Joly Vera Cardot c'est beau

Hier j'ai fait l'acquisition d'un beau lot que vous avez déjà un peu découvert. Je poursuis cette exploration avec une exceptionnelle découverte pour nous amateurs de photographies d'architecture et de cartes postales.
Nous avions vu sur ce blog que Lucien Hervé nous offrait l'occasion d'acquérir ses clichés depuis Le Corbusier par une série de cartes postales nous laissant croire que ce grand photographe est ainsi accessible aux collectionneurs modestes.
Mais voici qu'un duo de photographes parmi les plus prolifiques (55000 clichés !), les plus subtils et les plus représentatifs de l'attention portée à l'architecture nous offre également des cartes postales : Pierre Joly et Vera Cardot.
Voici un exemple magnifique:





Nous sommes au centre œcuménique de Chamrousse. Les deux cartes postales sont imprimées par Lescuyer à Lyon et elles nous donnent bien comme architecte P. Jomain et l'atelier Berthe-Chappis-Jomain. Elles nous disent bien également que Pierre Székely est le sculpteur avec J. M Pirot et I. Gaillard.
J'aime tout particulièrement la première carte postale, celle de l'extérieur car elle confine à une abstraction. L'ombre des arbres posée sur la neige tombée en tas qui déjà semble vouloir arranger l'architecture à l'ordre de la nature ajoute encore un trouble sur le plan de la construction. On ne sait plus très bien visuellement où on en est !
Et cela au lieu de créer une gêne, offre l'occasion de voir ce lieu comme un moment du paysage, comme lorsque subitement d'un vallon surgit un rocher. Le noir et blanc est aussi le lien de cette photographie, ce qui unit sa surface, la rassemble en un jeu formel plus saisissant sans doute que le programme architectural. Mais il n'est pas question pour les photographes de composer à l'envi cherchant l'audacieux et l'improbable pour faire image, mais bien d'inventer un regard sur le réel, une manière simple d'être face au "phénomène" d'une architecture prise dans un espace. Regardez comment le reflet dans les vitres semble prolonger comme un écho l'extérieur et le fondre à l'espace intérieur.
L'intérieur justement, les photographes choisissent de le brûler à la lumière. Par la baie vitrée (dessinée par Jean Prouvé ?), la blancheur d'un temps de pose long qui veut aller chercher les détails d'un intérieur sans l'utilisation du flash, donne un vide, ruine le paysage, l'efface au profit d'une valeur absolue qui donne tout à voir en opposition au beau dessin de cet espace. Le crépi du mur du fond vibre, les sculptures-objets forment une phrase au mystérieux alphabet et les bancs sont comme des rythmes en cascade, simples mais nécessaires. Regardez le détail des galets sur le sol qui font, excusez-moi, la nique aux lambris du plafond.
Voilà de la belle photographie. Voilà de la belle architecture, voilà un lieu, un espace qui s'affirme.
Alors tant que des photographes de cette envergure, tant que des architectures à la fois modestes et évidentes se donneront à voir et à jouer ensemble sur des morceaux de papier 10x15cm, je serai celui qui croit (et vous avec moi) que collectionner les cartes postales a un sens pour apprendre et jubiler.