vendredi 2 janvier 2009

Sens, G.E.M, un supermarché à sauver


Comme vous venez de le lire Jean Nouvel a travaillé sur le supermarché G.E.M de Sens.
Mes dernières conversations avec Monsieur Claude Parent révèlent un véritable attachement de sa part à ce bâtiment exceptionnel dont il est l'architecte. J'ai eu la chance de le visiter il y a peu (deux ou trois ans) et il était encore en très bon état constructif, à peine camouflé par une peinture et des accroches commerciales. Il appartient je crois au groupe Carrefour qui a malheureusement totalement transformé le supermarché Reims-Tinqueux également de Monsieur Parent.
Sens est un chef d'œuvre.
Ce n'est pas une affirmation personnelle mais la réalité d'une histoire de l'architecture française.
De par son programme, son application de la fonction oblique, sa puissance formelle et conceptuelle et la rareté de son type il devrait être protégé tout comme le supermarché de Ris-Orangis.
Je ne sais pas si actuellement quoi que ce soit est prévu en ce sens, et je vais m'employer à le savoir mais je demande à toutes les bonnes volontés de se joindre à moi pour une action de sauvegarde.
Je ne suis rien seul.
Je n'ai rien pu faire pour sauver Reims-Tinqueux, je n'ai rien pu faire pour sauver La Rafale à Reims également, je n'ai rien pu faire pour sauver le Casino de Royan alors je vais tenter là quelque chose.
Je suis à votre écoute pour des modes d'actions et ce blog sera une liaison entre nous.
Je propose que cette énergie prenne le nom de "Sens Oblique".
Dès lundi je me mets au travail, qui m'aime me suive...
Voici quelques images du supermarché hier et aujourd'hui. Celles d'hier sont tirées de la revue "Architettura" N°208 de 1973, revue italienne à laquelle je tiens beaucoup car offerte par Marc Hamandjian. Les photographies d'aujourd'hui sont de Claude Lothier.







en lisant Claude Parent, de Le Corbusier à Jean Nouvel




Quelques pages plus loin.
Voilà qui est très intéressant. Dans un long chapitre nommé "les collaborateurs" dans lequel Monsieur Claude Parent nous éclaire sur le fonctionnement de son agence et la répartition des tâches à l'intérieur de celle-ci, il explique son expérience de jeune architecte au sein d'équipes comme celle de Le Corbusier et donne son opinion sur la manière de faire travailler à son tour les jeunes architectes qui le rejoignent.
En quelques lignes on passe de Le Corbusier à Jean Nouvel !
La question de la filiation est une belle question. Pour Claude Parent il est question de fusion. Il faut que l'équipe travaille comme un seul homme, connaissant tous l'ensemble du projet, ayant tous le droit à l'écoute donc le droit à la parole. Mais on sent également une grande exigence, la nécessité aussi dans ce mouvement fusionnel d'une grande force de caractère. Il faut donner de la voix en attendant son tour. Je crois qu'on pourrait dire que le collaborateur a le devoir de creuser le sillon (profond autant qu'il veut) mais ne doit pas en inventer un autre. C'est être créatif (le devoir) dans l'absorption complète du concept du patron. Et c'est dur. Ce qui vaudra quelques départs mais ceux-ci sont presque désirés comme une preuve de la compréhension mutuelle et de la filiation. C'est une méthode pédagogique assez droite et claire mais aussi douloureuse. Cela permet, pour le jeune collaborateur de mesurer son véritable attachement à sa liberté et donc à sa propre création. Si je ne peux pas faire ici ce que je suis c'est bien que je suis.
Ce qui est étrange c'est ma joie incroyable de voir le nom de Jean Nouvel dans ce livre. Rappelons que nous sommes en 1975... Et que si je savais l'attachement de l'un pour l'autre, il est remarquable que Claude Parent le cite d'emblée dans sa première autobiographie !
Je vous invite à lire la préface que nous donne Jean Nouvel dans le livre "Claude Parent vu par"
qui commence par ces mots : " Je ne lui dois rien".
C'est cet écart et la possibilité de pouvoir formuler de telles sentences avec ironie mais aussi avec lucidité qui fondent ce type de rapport humain. Le reste de la préface pourrait être la définition du mot générosité...
Alors Monsieur Parent nous indique qu'il a travaillé sur Rezé avec Le Corbusier mais là ma collection a un trou. (Marseille oui, Berlin oui, Firminy oui, Rezé non)
Alors je le comble avec deux cartes postales de constructions de Monsieur Jean Nouvel. Il s'agit de l'institut du Monde Arabe à Paris. J'ai découvert Jean Nouvel par ce bâtiment. Il reste l'exemple puissant d'une compréhension d'un site, de l'invention d'un lieu. J'aurais aimé avoir une carte postale du supermarché GEM de Sens mais je n'en ai point. Il faudra pour le sauver en éditer ?


Ces deux cartes postales sont éditées par l'Institut du Monde Arabe. il s'agit de la façade sud et de la faille. Mot provenant d'un vocabulaire commun avec Monsieur Parent.
Je vous rappelle les ouvrages cités :
Claude Parent vu par...
éditions le Moniteur mars 2006
le fou de la diagonale Claude Parent, architecte
Béatrice Simonot
éditions Acte Sud septembre 2008
Claude Parent architecte 
par lui-même
éditions Robert Laffont 1975