Et si nous donnions la parole à ceux qui écrivent les cartes postales ?
Si nous le faisons si peu c'est que, bien souvent, rien dans la correspondance ne fait signe positif ou négatif à l'architecture représentée. Le correspondant explique simplement sa localisation et ne juge que peu la construction, l'urbanisme et son espace.
Pour aujourd'hui je vous propose donc de voir que parfois en une ligne, une petite intonation on peut sentir un jugement, un avis. Je vous préviens : c'est court !
Profitons-en pour évoquer un architecte que nous aimons beaucoup ici : Fernand Pouillon.
Commençons :
Cette carte postale Abeille-Cartes en photo véritable nous montre Meudon-la-Forêt et la Résidence des Deux Bassins dans un noir et blanc bien senti. La perspective sur les blocs alignés, la rigueur du dessin, sa fermeté, la gestion des espaces font écho à un cadrage qui libère le premier plan avec un champ de graminées vibrant mettant la ville à la campagne. C'est, à n'en point douter, une belle image de cet ensemble. Et voici le verso :
"à Meudon la Forêt, il n'y a pas de petites villas mais des grands immeubles. Cette carte vous en donnera une idée. Il y en a déjà une assez grande quantité et on en construit toujours."
Il est aisé de s'amuser de l'aspect déceptif de l'absence de petites villas, il est aisé de saisir comme un regret soufflé dans le fait que l'auteur affirme en même temps qu'il y a beaucoup de constructions et qu'on en construit toujours...
L'image reprend alors bien cet avis en proposant à la fois la multitude répétée du construit et le vide du premier plan qui évoque les futures constructions...
Une autre :
Toujours à Meudon-la-Forêt, Toujours les Deux Bassins, cette carte multivues par Yvon éditeur nous donne à voir d'autres aspects du bel ensemble. On retrouve sur la vue en haut à droite la perspective ici retournée de la carte postale précédente. Cette fois une croix agrémente la photographie et Denise se sert de la carte postale pour se donner à voir, se représenter dans la ville. Lisons-la :
Pour moi, tout tient dans la phrase d'introduction : "Je commence à m'habituer à ma nouvelle ville, heureusement que j'ai beaucoup à faire ces temps-ci..."
Pour que les occupations soient perçues comme une chance c'est bien que l'installation et l'acclimatation doivent être un rien difficiles ! Denise marque par deux fois sa carte postale, d'abord d'une flèche puis d'une croix. Cet "acharnement" à se situer pourrait bien aussi être une manière de s'assurer à elle-même que c'est bien là maintenant qu'elle vit. Au moment où elle a tracé ces signes, j'imagine son état de projection, j'imagine son attention à lire l'image de sa vie, de sa géographie. "ici et maintenant"
Nous, nous profiterons surtout une nouvelle fois de la grande qualité de l'ensemble architectural. Et pour finir, parce que justement nous aimons Fernand Pouillon, nous irons cette fois à Boulogne-Billancourt voir l'ensemble du Point du Jour par l'intermédiaire de cette carte postale Lyna :
On se demandera comment le photographe a fait le pari de viser le vide entre l'architecture, la rue et son ciel nuageux. Comment, de la sorte, il définit l'espace urbain, comment il fait glisser l'œil vers le reste de la ville, rejetant de gauche et de droite les belles constructions qui donnent à voir par leur larges ouvertures l'intimité des intérieurs :
Pas de texte au verso de cette carte, mais le silence du carton doit nous servir à nous raconter à nous-même notre plaisir de la ville et de son exploration par les images.
Et ne manquez pas la visite du très beau site sur Fernand Pouillon ici. Vous y trouverez des images contemporaines des lieux que vous venez de visiter par les cartes postales.
2 commentaires:
Bonjour,
Comme toujours vos pages de blogs sont très intéressantes. Nous allons informer nos adhérents et mettre cette page-ci sur notre site. Merci de votre soutien et de vos analyses. La photo du Point du Jour, vous avez raison, est étonnante.
Bien cordialement et bonne continuation.
Merci mais je suis bien épaulé par votre site !
Bien à vous.
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