mardi 15 juin 2010

Paris, Paris, Paris, Paris

D'abord on se demanderait s'il s'agit encore de Paris.


La carte postale Lyna en exclusivité Desju, nous donnerait La Défense comme nom.
Elle serait même un peu précise avec le nom des tours comme Europe Aquitaine, E.D.F-G.D.F, Vision 80, Aurore, Manhattan G.A.N.
La carte serait datée au stylo bille bleu du 13 12 77.
Mais mon œil regarderait surtout la disposition de la foule, tournée tout entière vers le même point focal.
Mais que se passe-t-il à gauche de l'image ?


Puis dans cette foule je regarderais deux jeunes femmes très différentes. La première à gauche dans un joli ensemble parme volant au vent me ferait penser à Bernadette Lafont dans un Truffaut.
La seconde, cheveux courts et jeans aux pattes extra larges et au sac de toile sérigraphié d'un logo arc-en-ciel à Véronique Jannot dans Pause-café. A-t-elle pris des clichés de l'événement avec son appareil-photo japonais ?
Mais oui, que se passe-t-il ?
Puis, prendre le train.


Gare de Lyon depuis le pont Charles de Gaulle.
Une carte postale Alliance à la photographie de Marc Leconte.
Celui-ci détermine un cadrage serré enfermant le beffroi entre des tours froides et noires.
Le pont au tablier taillé dans une superbe courbe disposerait d'une nuée de lampadaires indiquant l'épuisement perspectif, du plus grand au plus petit.
Tout cela est écrasé pour former une image de ville dense, implacablement moderne et glacée.
A vrai dire superbe.
La carte postale nous donnerait alors le nom des architectes de ce bel ouvrage d'art : messieurs Louis Arretche, Roman Karasinski, Marcel Nouviale.
Avant démolition et regrets patrimoniaux, voir encore le Forum des Halles.


Le voir quatre fois dans de petites fenêtres, au temps de sa gloire giscardienne, sa gloire d'avenir chic.
Paris c'est chic sous les courbes blanches d'une véranda commerciale bien dessinée.
Un trou comblé d'une architecture épuisée en 30 ans.
Tenter de faire mieux à moins de décider que l'endroit devienne en permanence un concours d'architecture.
Déclarons la destruction complète tous les 20 ans des Halles et leur reconstruction. Dans une vie voir trois ou quatre lieux différents au même endroit.
La carte postale Abeille-Lyna nous donne le nom des architectes qui n'ont pas ici démérité quoi qu'on dise aujourd'hui : messieurs Vasconi et Pencreac'h.
Et la grande architecture :


Ledoux rencontre Bernard Huet à moins que cela ne soit le contraire.
La place Stalingrad au métro frôlant la superbe rotonde dans un geste tellement hardi digne de la ville de Jules Verne.
Et si la définition de la ville c'était ce genre de collage, offrant soudain du haut du métro un regard impossible.
Et l'architecte d'aujourd'hui regardant et analysant la place, vivant avec le lieu, mesurant, arpentant, définissant réinvente une place en achevant le travail de l'autre, celui disparu au fond d'un registre formel qui couve encore dans les esprits post-modernes.
Merveille de dessin, de géométrie, d'équilibre ressentie ici avec hommage, sans timidité.
Le photographe accuse le jet d'eau de parodie et le gris de l'eau sectionne l'image en deux. Derrière le métro, les égarements de la spéculation immobilière, les ratages du genre, la citation balbutiée puis crachée à prix d'or...
Paris, Paris, Paris, Paris.

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