samedi 7 juillet 2007

l'avenir, le pistolet, le solitaire



J’insiste un peu. Et, aussi pour comprendre, je suis le chemin de Mathieu Pernot.
Dans ma collection (classeur étiqueté “very boring” 5), je trouve cette carte postale de Fontenay-aux-Roses, rue Alfred de Musset. Elle date visiblement de la fin des années cinquante, début des années soixante, mais n’a été postée qu’en 1986, le 12 mai très précisément à 17h15.
Je suis attiré par l’impression de cette carte très similaire à celles de Mathieu Pernot et aussi par le groupe d’enfants qui se tient à distance du photographe. Est-ce lui qui a demandé aux enfants de ne pas s’approcher, voire de rester là pour animer le cliché ?
Le photographe vise le bâtiment c’est certain et les enfants eux sont là, simplement attirés par cette activité. Ils arrêtent leurs jeux et viennent voir. Deux d’entre eux regardent le photographe mais ils ne franchissent pas la pelouse, restent sur la bordure.
Les quatre autres du groupe regardent l’enfant solitaire à gauche qui semble partir. Mais ce qui attire mon œil, c’est le pistolet. Je l’ai vu immédiatement, le pistolet.
Et comme dans Blow-Up ou tel un Blade Runner, j’explore l’image et invente l’histoire.
C’est le plaisir de ce genre d’exploration. Ce jouet, ce pistolet est-il un cadeau de Noël, un cadeau d’anniversaire ? Et si ce seul objet et les amorces qu’il ne manque pas de faire pétarader étaient le point focal de cette réunion de gosses ? Ils jouent aux cow-boys et aux indiens et la 403 du photographe se gare. Celui-ci sort du véhicule la chambre, le pied et l’immense fourre-tout plein d’objets inconnus des enfants. Et c’est curieux un enfant. On va voir, on tourne autour du photographe, on lui pose des questions. Et ça l’embête un peu et finalement il se dit que ça fait vivant sur une image des enfants, c’est l’avenir les enfants, c’est la joie de vivre. Mais pourquoi l’un d’entre eux s’en va ? Doit-il aller chercher le pain ? A-t-il été exclu du groupe ? L’ombre est longue c’est donc soit le soir soit le matin. Ou va-t-il ce solitaire ? Il semble être visé par le pistolet. Menacé ?
Pas un seul adulte à l’horizon (sauf le photographe). Personne aux fenêtres.
Ils ont tous aujourd’hui quarante de plus.
“On ne subit pas l’avenir on le fait”. J’espère qu’ils ont eu cette chance.

carte postale André Leconte. Paris.
éditions d’art Guy.
Photo véritable.

1 commentaire:

Claude Lothier a dit…

Le frêle caïd équipé d'un pistolet semble à la tête d'un gang de plus petits que lui ; ils se sont ligués pour exclure le plus grand, le bon élève, qui s'éloigne à regrets, contemplant avec amertume le spectacle d'une hostilité un peu lâche. Mise en scène ? C'est bien probable. Réalisme ? Tout autant. Belle image ! Merci David