mardi 20 décembre 2011

en gradins, en jardins

La ville de Vermelles a de la chance. Sur son sol, messieurs Andrault et Parat ont construit ça :



un détail :


La Résidence "Rénovation" est du type gradins-jardins que j'affectionne tout particulièrement.
Ce type de semi collectif dont nous évoquons ici le plus souvent possible la parfaite quadrature du cercle privé-collectif.
Ils sont dans leur image évocateurs d'une influence nord-africaine avec leur toit-terrasse, les communications parfois incroyables entre les appartements. Ils sont aussi une sorte d'écho à Moshe Safdie et son superbe ensemble pour Montréal Expo 67.
Les gradins-jardins fonctionnent le plus souvent parfaitement bien. Les jardinières dégoulinent littéralement de végétation au printemps, les terrasses se couvrent du linge qui sèche, les parasols criards cachent des goûters aux enfants... criards et une sorte d'ambiance étonnante s'en dégage pour qui passe au pied ne sachant plus très bien si oui il peut monter par là ou non.
La vie.
J'accompagne cette carte postale Combier de Vermelles avec des photographies de deux spots de gradins-jardins. L'un sur les hauteurs d'Evreux, l'autre à Fontenay-les Roses. Dans les deux cas parfaitement entretenus et vivants.
Je montrerai un jour ceux de Cléon et ceux d'Amfreville-la-Mivoie.
Merci à Emmanuel pour celui d'Evreux.
Evreux donc :






Fontenay-aux-Roses :



Et ça est-ce vraiment encore du gradin-jardin de messieurs Andrault et Parat ? En tout cas j'aime ça ! Le jeu des escaliers et des volumes est superbe non ?




lundi 19 décembre 2011

aires de jeux au pied de l'architecture

Une petite suite de cartes postales sur l'espace dédié aux enfants au pied de nos architectures. C'est un objet d'étude qui semble aujourd'hui trouver un nouveau regard et nous avons sur ce blog de nombreuses fois évoqué les qualités de certaines réalisations comme celles de Messieurs Szekely, Jacques Simon ou encore les groupes comme Group Ludic ou Sculpture-Jeux.
On peut aussi se reporter au livre et à l'exposition Anthologie Aire de Jeux d'Artistes par Vincent Romagny chez Infolio ( isbn 978-2-88474-183-5).
Voici donc une manière nouvelle de regarder les lieux et les cartes postales qui disent souvent également la qualité des espaces, tentant de prouver que l'architecture sait parfois se répandre au sol à la hauteur des gamins, alternant préoccupations du design, du paysage et du bâti.
On commence :



Nous sommes à Franconville au pied d'une tour d'une grande banalité, sorte de prototype calme de la tour moderne. Pour ce qui est de l'architecture, à part sans doute, l'efficacité hygiéniste, il y a peu à en dire...
Il en va de même pour les jeux des enfants...
On retrouve la balançoire en tube d'acier, le toboggan en... tube d'acier, le tourniquet en... tube d'acier... et l'inévitable tube... en béton, collecteur des eaux usées qui fait toujours un praticable pas trop cher !



Du sable et les enfants alternant entre vertige du toboggan et mal au cœur du tourniquet finissent par certainement trouver dans la carcasse d'une camionnette ou la friche d'un terrain vague bien plus de joie que dans cet espace sous surveillance hautaine d'une tour grise. On remarquera la maman qui regarde les enfants en blouse faire leur quart d'heure de détente.



On passe...

Où croyez-vous être ?
Allez...
Du marron à l'envi, des cheveux longs sur des épaules d'adolescents désœuvrés en pantalons de velours côtelé, des constructions alignées sans fantaisie...
Nous sommes en Allemagne à Unna-Massen-Nord sur la "Spielplatz" que mon allemand très pauvre me permet de traduire en place des jeux. Immense d'ailleurs ! Regardez comme elle va loin et on la dirait traitée en zones d'âges pour des praticables de plus en plus risqués ! C'est sans doute pour cette raison que le petit groupe d'adolescents a trouvé refuge sous ce tipi de rondin de bois. Mon œil ne peut s'empêcher de loucher sur les trois barres de la chaussure Adidas...





Puis la neige...


Au pied de l'architecture de Monsieur Breuer à Flaine, on trouve sur la neige tombée en abondance une petite structure tout à l'opposé du modèle architectural, une sorte d'édicule jaune très beau :



Ce qui trouble c'est la solitude de l'objet !
Perdu au milieu du vide blanc de la place, sans doute que la neige cache en partie l'aire de jeux.
On notera que la carte postale Théojac nous donne bien le nom de l'architecte Breuer pour cette galerie marchande, le "Cassiopée", l'hôtel des Lindars et l'Aldebaran... Nous sommes en 1977.
Allons à ...



Grigny ! C'est écrit sur cette carte postale multi-vues de chez Estelle éditeur. On s'attardera surtout aujourd'hui sur la fenêtre en bas à droite avec ce jardin d'enfants aux jeux oranges si design comme on dit aujourd'hui !



Admirons les beaux tourniquets en plastique moulé orange qui ressemblent à des soucoupes volantes, la belle échelle en bois jaune et... orange et d'étrange tripodes en plastique orange...
On retrouve surtout cette belle girafe que nous avions déjà vue là. Girafe dont des cordes partent de la tête et qui permettent de tourner en se balançant !
Passons un cran...


Nous sommes à Vichy devant l'ensemble de la Résidence et du Marcotel. Ici non seulement des praticables similaires à ceux de Grigny sont posés sur le sol de sable mais un vrai paysage de jeux est constitué.
Une petite colline se coupe en deux offrant ainsi une échelle de corde pour la traversée, un tube est enfoncé dans la terre et doit sans doute traverser la colline. L'ensemble est bien dessiné, ambitieux et tout est à l'unisson pour faire de cet espace un vrai espace construit et pensé pour le jeu.



Le très beau praticable de bois au premier plan répond parfaitement aux courbes du sol et joue le contraste avec les tripodes de plastique. Un dessin de métal (?) fait de courbes reste mystérieux comme une sculpture de Land Art.
A n'en point douter un bel ensemble pour les glissades, les sauts, les cachettes...





dimanche 18 décembre 2011

courbes et contre-courbes

Voici deux exemples d'églises modernes bien typées qui ont sans doute suivi l'effet Ronchamp.
Certainement moins spectaculaires, certainement beaucoup moins connues, elles ont sans doute aussi moins l'idée et la prétention de faire sculpture.
Pourtant elles sont indéniablement d'une grande qualité.
Elles font partie de cette histoire modeste de l'architecture contemporaine, celle qui nous entoure et qui ne demande qu'à nous dire une fois de plus sa richesse et que nous devons aujourd'hui aimer sauver et partager.
Commençons par Poitiers !



Vous venez de voir l'église Saint-Cyprien de Poitiers.
Poitiers est une ville romane de tout premier plan et il est donc aisé de penser que l'architecte a dû composer avec cet héritage.
Il n'a pas pastiché, il n'a pas cédé à l'influence formelle trop vite mais a su tirer une forme de quintessence qui tout en rendant hommage aux merveilles romanes de Poitiers fait de cette église une église de son temps. L'entrée de celle-ci est l'exemple parfait de cette réussite. On la voit à la fois massive, solide et même sévère, elle offre comme une faille adoucie entre les deux courbes, faille dans laquelle le croyant devra passer. Il est à la fois menacé et protégé, écrasé et accueilli.
Le toit, feuille posée sur des pierres, d'une finesse magnifique fait une visière dont l'ombre dessine les courbes.
Le clocher est presque un campanile car s'il est encore accroché à l'édifice, il est comme une tour de guet d'un château fort : superbement dessiné.
On remarquera également que ce vocabulaire un rien défensif est aussi accentué par les ouvertures systématiquement allongées dans la hauteur et comme striées.
Mais regardez également le détail du parement de pierres avec des moellons qui parfois dépassent et créent ainsi un décor simple et rigoureux. L'architecte de cette église serait Monsieur Marcel Baudouin. Son église a obtenu aujourd'hui le Label Patrimoine du XXème siècle.
Il nous faudra aller voir cette belle église à la prochaine descente vers Royan. La carte postale Théojac n'est pas datée mais l'église est de 1965. On s'amusera aussi du ciel parfaitement nettoyé...
Et maintenant à Longueau...



On pourrait presque retrouver l'idée des courbes de Poitiers. Mais l'échelle est moindre et le dessin ici permet de lire la fonction. L'un des deux cylindres abrite le baptistère.
On regardera aussi le seuil que je trouve un rien maladroit.
Mais une flèche audacieuse rompt avec toutes ces courbes et monte en fusée vers le ciel chargé de Longueau.
La flèche est de béton et percée de vitraux et les murs sont en pierres. Là aussi le matériau et la forme de double cylindre emporte l'ensemble vers une imagerie de construction défensive de château fort raccourci !
Depuis le point de vue de James Platel, le photographe de cette carte postale aucune ouverture n'est visible. On peut comprendre ici un peu mieux la pourtant grande clarté intérieure de cette église.
On sait que ce jeu de la surprise lumineuse est souvent l'une des bases de travail de l'architecture religieuse qui se doit de la mettre en scène, de la tirer de l'usage commun vers le symbolique. C'est là limpide. De l'extérieur l'église semble impénétrable, fermée même dure puis dès l'entrée franchie le prisme triangulaire disperse le jour à l'intérieur en le localisant dans une forme surprenante et symbolique puisque ce jour est cerné dans une pointe montant au ciel...
Marcel Gogois en serait l'architecte.
Au dos de la carte postale qui a servi pour un jeu-concours, la correspondante a écrit : on ne peut voir bien qu'avec le cœur.
Je vous laisse voir donc...

mardi 13 décembre 2011

Ronchamp sous échafaudages



Malgré un état un peu abîmé, cette carte postale est sans doute l'un des plus beaux et des plus émouvants documents publiés sur ce blog.
Il touche l'une des constructions emblématiques d'un des plus grands architectes du XXème siècle :
Ronchamp et Le Corbusier.
Alors les snipers d'images qui ont déjà sauté sur la carte postale sans avoir lu ce texte savent déjà pourquoi je suis si enthousiasmé. Il s'agit d'une carte postale nous montrant le chantier de Ronchamp.
Regardez...



...oui je vous comprends.
On devine que le bâtiment est presque terminé même si le crépi n'est pas posé et laisse apparentes les pierres. Au sol sont rabattus tous les bois de coffrage et des échafaudages montent encore sur la construction.
Quelle image !
Je vous donne quelques détails qui vont vous réjouir :
Et comme cadeau incroyable, là sur le toit de Notre-Dame du Haut, deux petites silhouettes marchent.
La carte postale en véritable photographie ne comporte aucune indication de l'architecte ni de date. Il ne s'agit pourtant pas d'une carte-photo mais bien d'une édition. L'ancien correspondant a lui-même écrit en grand au stylo-bille "le Corbusier" et "arche de Noé".
Cela va bien ensemble non ?
La carte est légèrement découpée sur sa hauteur. Il manque donc un peu de ciel.




Magnifique contre-fort qui recevra des vitraux.

Le "crépi" commence à recouvrir la bâtisse.

S'agit-il d'un arbuste posé sur le toit comme certaines traditions locales l'obligent lorsqu'on construit une maison ?
Et regardez le raccord entre le toit et l'angle du mur... un rien difficile !

les trous dans les murs semblent être ceux nécessaires aux échafaudages.

dans le panneau de Jean Prouvé

Et dire que j'ai intitulé il y a encore peu, un message : Jean Prouvé très discret à Royan !
Or, si j'avais vraiment voulu bien parler de l'architecte et de l'ingénieur, j'aurais dû dire qu'il est exceptionnellement présent dans cette ville et dans sa région.
La discrétion étant plus une manière de dire que sa présence n'est pas d'une visibilité directe alors que son œuvre est bien là.
Il suffit de... regarder les cartes postales et aussi de lire quelques ouvrages.
D'abord, sans doute la pièce la plus remarquable de Jean Prouvé à Royan est bien l'une de ses maisons. Nous avons déjà vu cette beauté ici et je me souviens avec émotion de sa visite grâce à Madame Quentin qui s'occupe activement de l'Association de Défense de l'Eglise de Royan.
Alors je suis à l'affût de cartes postales où nous pouvons voir cette maison. Peu pour le moment la donnent à voir directement mais voici une vue du ciel qui vous permettra de la situer. Elle est fortement exposée aux vents salés car il s'agissait alors d'éprouver sa résistance !
Regardez bien...

d'un peu plus près...

et voilà !

Puis n'oublions pas la participation de Jean Prouvé pour le Palais des Congrès. On devine facilement par exemple sur cette carte postale...






... la présence des panneaux de façade qui sont bien de l'ingénieur, panneaux que l'on retrouve au dos du Palais des Congrès sur cette autre carte postale.







Je n'ai malheureusement pas de cartes postales de l'intérieur qui recèle également des éléments Prouvé dont certains ont déjà à regrets trouvé le chemin des collectionneurs privés...
Prions pour leur retour !
Mais voici qu'une nouvelle carte postale dont vraiment je ne soupçonnais pas l'existence relance encore l'histoire de Jean Prouvé avec Royan.



Ici nous ne sommes pas exactement dans la ville mais sur la Grande Côte devant le Restorama. Il s'agit d'une exceptionnelle carte Théojac car elle nous donne bien à voir à nouveau sur la rotonde les panneaux de façade Jean Prouvé.
D'ailleurs l'ensemble architectural est assez beau avec son toit parapluie mais aujourd'hui totalement défiguré. Que sont devenus les panneaux ?
Peut-être dorment-ils dans le garage du propriétaire ? Dans un grand musée international ? Dans une benne à ordures ?



Je trouve dans Architecture d'Aujourd'hui d'avril 1953 un petit article consacré à cette construction peu connue dont l'architecte serait Monsieur Simon. On voit que les panneaux sont rouges et on peut aussi voir les portes vitrées. Les photographies sont de Sabine Weiss.
Je vous gâte...
Dans le même numéro, une publicité pour les bacs autoportants Jean Prouvé !