samedi 20 septembre 2008

faire le plein





124 cartes postales.
124 cartes postales achetées ce matin entre Elbeuf, Oissel et Pont de l'Arche. Je crois que j'ai battu un record personnel. Vous comprendrez que je ne vous livre pas tout tout de suite. Mais je vais dans un panaché de fin d'été vous montrer quelques-unes des plus marquantes, les autres pouvant être des redites légères d'images que vous connaissez.
Mais commençons par un grand bâtiment remarquable dont je vous ai pourtant déjà parlé, il s'agit du centre d'échanges gare Perrache. L'architecte Monsieur Gagès y a fait œuvre d'une modernité foudroyante, d'une analyse remarquable et a su non seulement réaliser l'ouvrage mais y inventer un type de construction. C'est un centre d'échanges qui produit un fluide étrange, la mobilité du voyageur. Ici les transports s'épousent, ici le piéton trouve un chemin de fer, un chemin de goudron à sa guise. Ici il gagne de la vitesse. C'est un nœud, c'est un lien. La carte postale est une édition Combier en cimcrome expédiée en 1986.
On poursuit avec l'Hôtel de Ville de Nanterre. On ne subit pas l'avenir on le fait est la phrase écrite au dos par le participant au jeu. Voyons ce que nous confie le guide : Une municipalité communiste construit sa mairie. Lorsque le bâtiment sera achevé, une étude comparative intéressante pourra être faite avec la mairie de Montpellier, par exemple. Ceci pour savoir quelles images respectives ces équipes politiquement opposées veulent donner d'elles-mêmes, quels rapports elles entretiennent avec leurs administrés, quelle place elles accordent à l'individu. Une étude similaire pourra être effectuée avec la préfecture voisine quant à la volonté ou l'absence de volonté de traduire architecturalement une autorité reçue.
Les architectes sont J. Darras et Y. Bedon.
Une carte multiple nous montre les Olympiades à Paris. On peut deviner au fond le magnifique bâtiment de messieurs Andrault et Parat pour la Faculté des Lettres et des Sciences. J'aime assez ce parvis aux petites boutiques étonnamment coiffées de toits en pagode. Je crois que lors de ma dernière visite de ce quartier en avril dernier des travaux étaient en cours, j'espère qu'ils n'auront pas trop dégradé le lieu. Le pied de la faculté des lettres est lui complètement abîmé et inaccessible.
Pour contraster au maximum, voici une vraie découverte, une vraie architecture, une vraie carte postale : voici la cabane de Henry David Thoreau, celle du magnifique ouvrage " Walden ou la vie dans les bois". Je ne savais pas que ce cabanon était encore debout, je ne savais pas qu'il pouvait en exister des cartes postales, je ne savais pas que j'en trouverais une un jour à Oissel !
Si vous ne connaissez pas ce livre, arrêtez tout, fermez votre ordinateur et allez chez le libraire vous le procurer. Vous le lirez et vous retrouverez aussi un peu le rêve du cabanon de le Corbusier, ce désir de nature et de liberté. Je crois que cette construction doit être le plus petit bâtiment de ma collection.
Je vous livre le texte en anglais figurant au dos de la carte Historama publiée pour le bicentenaire de la Révolution Américaine : In 1845 Henry David Thoreau (1817-1862) built a house on the shore of Walden Pond in Concord, Massachusetts, at a cost of 28,12 $. Here, for two years, he lived in the cabin he built with his own hands in his experiment to prove that man could be independent of other men. He left Walden in 1847, and sometime later the house was moved to a nearby farm and later taken to pieces. In his book "walden" Thoreau left a complete description of the house that enabled the construction of this exact replica at the Thoreau Lyceum in Concord.
Replica, replica dommage.

dimanche 14 septembre 2008

un peu vers le nord-est et franchement à l'est






Au gré des trouvailles nous cheminerons en traversant l'Europe vers le soleil levant puis nous irons d'un coup très loin vers l'est, vers l'Asie en Chine.
Commençons par une ville que je connais un peu et vous aussi fidèles lecteurs et lectrices puisque nous retournons à Düsseldorf. Mais quand c'est bon c'est bon et ce matin j'ai trouvé cette belle vue du Schauspielhaus dessiné par l'architecte Bernhard Pfau entre 1959 et 1970. La prise de vue accentue admirablement les courbes du bâtiment et dégage une percée vers l'immeuble de Messieurs Hentrich, Petschnigg and Partners. C'est très beau. Du moins l'image car n'oublions pas que ce que je vois n'a pas valeur d'y être. Comment se fait-il que je n'aie pas de souvenir de cet ensemble ? Serions-nous passés au loin lors de notre voyage ? Avons-nous trop regardé les immeubles de Gerhy et pas assez le reste de la ville ? Mais pourtant je sais que j'ai adoré Düsseldorf. Et ce genre de carte postale vous donne furieusement envie d'y retourner. Elle est éditée par Hans Georgi en Farbfoto. Aucune date. Partons maintenant vers Budapest avec encore un immeuble qui veut nous rendre l'ascension possible par un étagement en gradins. Il s'agit d'un Recreation Home KPVDSz (!) of the Trade Union. C'est assez attendu mais ne manque pas, grâce à ses décrochements d'une certaine élégance. Mais qu'est-ce donc que le KPVDSz ? K et P sont sûrement les initiales de Parti communiste non ? La carte postale nous indique le nom du photographe Monsieur Gabber Csaba, le nom de l'imprimeur Nyomda Offset, et de l'éditeur Képzomuveszeti Alap Kiadovallalata à Budapest.
Enfin nous arrivons en Chine. Je vous joins l'enveloppe d'envoi qui réjouira les amateurs de timbres ! Voyez comme la Chine édite des cartes postales de bâtiments contemporains. C'est assez étonnant. Je ne connais pas assez la question de la construction en Chine mais il semble que la modernité (de ce type) soit vécue comme quelque chose à représenter et cela même malgré sa laideur incroyable parfois. Voyez ces grands immeubles posés, identiques le long de la voie rapide. La carte nous indique seulement qu'il s'agit de The Asian Games Village. Voyez Chang ning District People's Governement Shanghaï Municipality. C'est un peu plus dessiné, stylé dirais-je avec un jeu de façade complexe et une couleur surprenante. On a même droit à la fontaine sculpture sur le parvis. On remarque les boîtes à air conditionné sur les balcons... La carte donne beaucoup d'indications dont je ne sais que faire, impossible de savoir si c'est l'éditeur, le commanditaire ou même le lieu... Une date apparaît : 1997. A noter le format allongé des cartes ce qui me posera des problèmes de classement.

mercredi 10 septembre 2008

débrayage





Encore une fois les patrons (mais qui sont-ils finalement) de Renault décident du licenciement de milliers d'ouvriers. Une fois de plus la grande foire mondiale de l'heure de travail la moins chère fait des victimes, une nouvelle fois les choix commerciaux stupides des dirigeants conduisent à la restructuration (quel beau mot) de l'entreprise. Il faut dire qu'il était nécessaire, par exemple, que Renault produise un 4X4... (en plus il est laid)
Chez nous on est Renault comme Marc est Citroën. C'est étrange mais c'est indéfinissable. Il y a 50 ans, chez nous on était tissage et drap d'Elbeuf. Mais Renault est venu s'installer ici à Cléon il y a tout juste 50 ans, c'est l'anniversaire cette semaine, l'heure n'est pas, vous comprendrez à la fête.
Mon grand-père quitta les usines de tissages du centre d'Elbeuf pour aller travailler chez Renault et son fils, celui qui piqua la Dauphine pour aller en Italie (vous suivez ?) alla aussi y travailler au milieu des années soixante. Nous les garçons avons réussi à y échapper grâce sûrement à la crise des années quatre-vingt. Et puis on a vu l'épuisement de notre grand-père et celui de notre père qui travaillait de nuit à la Fonderie où il contrôlait la qualité des pièces. Vapeur d'aluminium et fatigue...
Enfant, on m'emmena mes frères et moi en visite pédagogique à l'usine. Je me souviens tout particulièrement de ce moment clef de ma vie d'enfant car je compris en quelques gestes la violence du milieu ouvrier et de l'usine comme un ordre imperturbable. Alors que nous visitions les ateliers, notre groupe croisa mon père un peu au loin et j'eus alors le geste normal d'aller le voir avec la fierté immense de le rencontrer là. Mais Un geste, je ne sais plus de qui, sûrement ma mère me retint. Je le revois encore ce père inapprochable, ne pouvant lui-même prendre la décision de venir, impossible de quitter le poste, nous faire un geste de la main et un léger sourire. Il n'était donc pas libre ce père. Il n'était pas libre là.
Cette violence que je garde presque comme un trésor sera ma force pour tout faire dans ma petite vie d'enfant pour ne pas entrer dans cet univers. Alors je traîne comme beaucoup des gens de l'usine ce mélange de fierté et d'horreur. La Régie c'était notre vie. Pour moi rouler en autre chose que Renault serait une traîtrise qui d'ailleurs ferait bien rire mon père ! A la régie (contraction de Régie Nationale des Usines Renault) il y avait aussi le Comité d'établissement et sa bibliothèque et discothèque magnifiques tenues par les syndicats et la C.G.T en particulier. Nous y allions pour emprunter des livres et aussi des disques. On pouvait choisir librement. Un paradis plein de surprises, d'une richesse incroyable. j'ai appris ici aussi à aimer les livres. C'était d'une grande ouverture d'esprit et très pointu. Et j'y ai beaucoup appris. C'était toujours un plaisir d'y accompagner ce père qui là pouvait être un peu plus libre. Nous avions notre nom sur une petite fiche et parfois quand le livre sortait peu, la dame ou le monsieur responsable nous disait la phrase magique : "Est-ce que tu veux le garder ?"
Oui. J'ai aimé ce lieu.
Après ces quelques souvenirs émouvants et pour célébrer l'anniversaire des millions d'heures de travail versées par tous ces hommes et femmes depuis cinquante ans à l'usine Renault de Cléon je vous montre quelques cartes postales du site et deux photographies de mon grand-pére le jour de son départ en retraite dans son atelier. Il mourra quelques années après.
On commence avec :
Cléon les usines Renault aux éditions J. Kettler en couleurs naturelles non datée. On voit le parking immense sur lequel les ouvriers rangent leur auto. Si grand que mon père pouvait se tromper de voiture et partir avec celle d'un collègue.
St Aubin-lès-Elbeuf vue aérienne l'usine Renault carte envoyée par ma mère à la sienne le 31 août 1972. C'est une carte Combier en Cimcolor.
Cléon Régie Nationale des Usines Renault qui forme l'acronyme RNUR que tous les elbeuviens prononcent avec délectation dans un roulement de R profondément guttural... Une édition Sofer en couleurs naturelles. Pas de date. On peut voir le gardien de l'usine faire un signe au photographe.
Un peu à part car il ne s'agit pas de Cléon mais je crois de Boulogne-Billancourt une image de Stéphane Couturier que j'aime tant. L'image se nomme "Renault" 1994 127,5x101,5 cm ministère de la culture et de la communication délégation aux arts plastiques fonds national d'art contemporain édition du musée Niepce. C'est une image vide des hommes et de femmes qui dans cet amas de grilles ont laissé de leur temps.

Jean Liaudet, ouvrier chez Renault



Voici donc mon grand-père à son poste pour la dernière fois.

mardi 9 septembre 2008

Claude Parent, des livres chapitre 1






Les coïncidences sont superbes. Elle sont un rassemblement inattendu de plaisirs simples.
En ce moment ce sont les ouvrages sur Claude Parent qui se rassemblent dans ma bibliothèque. Cela commence par une curieuse édition d'un ensemble de planches photographiques regroupées sous le titre "Petites maisons et villas d'aujourd'hui" aux éditions d'art Charles Moreau dans lequel figure une villa dessinée par Claude Parent et de nombreuses villas à Royan. J'ai dégotté cette merveille aux Emmaüs du Mans lors de mon week-end architecture. Cet ouvrage est curieux car il donne une impression d'avant-guerre avec sa typographie ronde très Déco. En fait l'ouvrage semble bien plus être de la fin des années cinquante et de plus il n'est pas broché sûrement pour l'utilisation en fiche par les lecteurs se précipitant chez l'architecte du coin avec leurs modèles sous le bras. Je veux quelque chose comme ça, assez moderne mais pas trop un peu comme ça là vous voyez avec de la pierre mais aussi pratique, il faut que tout communique, vous comprenez Monsieur et puis là une céramique de Dubroc et mon jet d'eau ici...
On trouve donc la planche 22 nous présentant une villa à Ville d'Avray dessinée par G.L. Bureau, Claude Parent et Yonel Schein !! Rien de moins... Mais c'est curieux car le bâtiment du haut ne semble pas correspondre à celui du bas. Deux villas différentes ? J'avoue aimer beaucoup celle du bas avec son long cheminement vers l'entrée très sculpturale et de Stjil ! On peut rêver à des couleurs vives sur les piliers de métal. Or, je retrouve dans un autre livre "Villas modernes" la même construction avec des photographies similaires mais légèrement différentes, c'est édité chez Charles Massin en 1962 et ça regorge de villas Arpel et royannaises. Donc, en conclusion on peut penser qu'il s'agit bel et bien de la même maison. Le Jeune Claude Parent devait faire là, à Ville d'Avray, ses premières armes. Un peu plus loin, toujours dans "villa modernes" on trouve une autre maison de l'architecte, cette fois en Seine et Oise, sans autre précision, on nous indique que la maison est pour une famille avec trois enfants. "Ce sont des toitures à très long pan qui déterminent le caractère plastique de l'habitation ; ces plans obliques, très accusés, distinguent la partie réception (couverture à double pente) de la partie sommeil (toit à une pente)".
Et puis je reçois hier l'édition originale de "vivre à l'oblique" publiée en 1970 chez l'aventure urbaine. Je possède la belle petite réédition chez l'excellent éditeur Jean-Michel Place mais j'avoue mon contentement devant l'original qui arbore peut-être une dédicace du maître : "au Docteur Labrouge (?) en souvenir du colloque des conservateurs de musées ; En regret d'une confrontation médecine et architecture qui n'a pas lieu."
Je conseille à tous de le lire et de le relire. Il y a de beaux passages sur les erreurs de Le Corbusier, contre le design et aussi sur la redécouverte du corps et de l'effort. Des paroles de la danse. C'est véhément mais c'est salutaire. J'aime aussi beaucoup les schémas gras au pinceau et à l'encre de chine. Un beau et indispensable ouvrage.
Et puis voilà que Julien Donada m'annonce la sortie prochaine d'un livre sur Claude Parent aux éditions Acte Sud écrit par Béatrice Simonot avec une préface de Jean Nouvel. cet ouvrage portera le titre " le fou de la diagonale-Claude Parent architecte" et sortira le 24 septembre prochain. Les conseils de Julien étant toujours bons, je crois qu'il nous faudra lire cela avec beaucoup d'attention. Je remarque que l'auteur du livre, les coïncidences je vous dis, fut enseignante à l'école d'architecture de Normandie à Darnétal dans la très belle Usine Fromage.
Julien fait une projection de son film sur la Tour E.D.F d'Issy les Moulineaux (Atelier de Montrouge) à la Cité de l'architecture (Chaillot) le 9 octobre. Je ne pourrai y être mais si certains d'entre vous peuvent s'y rendre, n'hésitez pas. il y a encore quelques petites pépites dans ma bibliothèque autour de Claude Parent, mais là sans coïncidence aucune alors gardons-les pour plus tard.

claude Parent, des livres chapitre 2




Claude Parent dans "villas modernes" chez Massin éditeur.

Claude Parent, des livres chapitre 3




Claude Parent chez Jean-Michel Place éditeur et aux éditions de l'aventure humaine.