mercredi 7 novembre 2012

Territoire Marcel Lods

Nous allons avoir encore l'occasion de parler de l'œuvre de Marcel Lods qui a laissé dans ma région bien plus qu'une empreinte : un territoire.
Cet héritage va de la reconstruction du centre ville d'Elbeuf et son ciné-théâtre, de la Zone Verte de Sotteville-lès-Rouen en passant par les très beaux et donc très menacés plots dits "verre et acier" des hauts de Rouen. Il aurait sans doute été nécessaire de déclarer ce territoire protégé au même titre qu'un parc régional mais il semble que finalement de destructions en détériorations successives la Région Normande, les différentes municipalités qui doivent pourtant à l'architecte l'intelligence d'une reconstruction populaire et humaniste préfèrent oublier cet héritage, casser ce patrimoine.
Pourtant quelle autre région peut s'enorgueillir d'un tel héritage sur une région si serrée et qui permet une véritable histoire de l'architecture des Trente Glorieuses au travers des transformations de la pensée d'un architecte qui passera du béton au métal en quelques années... (Firminy avec Corbu ?) Une leçon qui ne sera donc pas apprise, pas retenue et qui finira par des regrets bien plus tard, donc quand il sera trop tard !
Alors régalons nous de quelques œuvres majeures de cet architecte qui ne sont pas toutes dans la Région Normande ce qui vaut sans doute mieux pour elles...
Retour :



Voici une image rare. Il s'agit d'une carte postale nous montrant la très belle école de plein air de Suresnes. Nous l'avons déjà visitée mais ici c'est une image inédite que je vous montre. Nous sommes dans la salle à manger des Grands grâce aux éditions R. Gallois. On perçoit bien l'architecture, l'espace, l'ouverture et la révolution de ce mode constructif. Regardez comme le jour pénètre à l'intérieur, regardez comme l'échelle des agencements est celle des enfants ! La lumière rase leur tête et le petit mur de séparation est juste à leur hauteur quand ils sont assis. Debout, les enfants voient toute la salle et à l'extérieur ! On remarque que les filles mangent aussi avec les garçons, que les maîtresses sont dans la salle et que tous se savent photographiés. Qu'est-ce que la vie a réservé à ces regards ?











Alors ?



C'est beau non ?
Il s'agit de l'immeuble Bourgogne dans la Zone Verte, rue Garibaldi à Sotteville-lès-Rouen. La carte postale est une édition Estel en photographie véritable. Elle nous donne les informations suivantes : Marcel Lods, architecte en chef des bâtiments civils et Palais Nationaux, Alexandre, architecte à Rouen, Busse, architecte à Paris et Yvelin, architecte à Sotteville-lès-Rouen. Regardez ce beau dessin très abstrait, très pur qui va de rythmes en brisures et qui laisse toute l'expression plastique au mode constructif. Regardez comme les volumes, de décrochements en décrochements, ordonnent des espaces à vivre dont la répétition forcée forme enfin le style. Regardez comment le bâtiment touche le sol et comment il finit dans le ciel : finesse des colonnades, finesses des bétons, jeux des matières. La délicatesse du petit auvent au-dessus du dernier balcon prouve bien l'attention humaniste de ce dessin.









On retrouve notre architecture :



Cette fois un peu plus perdu dans son espace urbain, adouci par les feuilles qui chatouillent le cadre, notre quartier Garibaldi est en couleur grâce aux éditions Iris. Nous sommes au milieu des années 60. Presque pareil :



La carte postale des éditions J. Kettler nous offre un peu plus d'informations en nommant bien les deux immeubles : Bourgogne et Garibaldi mais omet le nom des architectes.
Nous reviendrons autant que nécessaire sur le travail de cet architecte. Il fait partie de mon paysage, de ma ville, de ma vie.
Il fut un initiateur de formes, un inventeur de méthode. Il mérite bien que l'on préserve son héritage.
Sauvons les "Lods" des Hauts de Rouen ! Protégeons la Zone Verte de Sotteville-lès-Rouen !
Notons qu'une partie des "Lods" des Hauts de Rouen est aujourd'hui réhabilitée avec qualité et sérieux : poursuivons !

mardi 6 novembre 2012

Faire la fête dans les Vosges

Il y a ainsi, on ne sait pourquoi, des constructions qui ont eu droit à pléthore de cartes postales. C'est le cas avec cette salle des fêtes de Saint-Dié dont je compte pas moins de six cartes postales différentes dans ma modeste collection !
Regardons de loin d'abord :



Depuis une légère hauteur, la salle des fêtes de Saint-Dié est ainsi cadrée par les éditions Yvon. On perçoit déjà bien son dessin qui m'a toujours fait penser à une église moderne. Cela est sans nul doute dû à son mur en claustra et à son toit en cuivre oxydé qui pourraient tous deux composer ainsi un lieu de culte moderne.
Pourtant c'est bien une salle des fêtes. L'éditeur installe la construction dans son paysage et s'amuse du contraste avec la Cathédrale au fond.
On s'approche ?



L'éditeur Iris préfère les jets d'eaux, élément urbain qui dit le chic, le beau. On admire depuis ce point de vue la belle courbe du toit qui plonge en son milieu vers les puissants piliers. C'est peut-être un peu moins gracieux de ce côté-ci, le mur aveugle bleu surmonté de sa petite cheminée est moins spectaculaire que l'autre côté. Regardons encore :



Des fleurs au premier plan, des arbres qui ont grandi, nous sommes bien devant une carte postale ! On se réjouira avec l'architecte du bleu du ciel à l'identique du bleu de la salle des fêtes. Mais faisons le tour :



Et paf !
C'est beau non ce claustra ? Aujourd'hui on dirait "résille "! Difficile depuis ce point de vue de comprendre l'objet. On regardera aussi le beau porche d'entrée décoré pour une occasion républicaine et le contraste de la belle plante grasse au premier plan, très sculpturale. La carte postale Iris nous donne deux noms d'architectes pour cette salle des fêtes : Messieurs Bertrand et Ringwald.
Sur le côté :



On comprend mieux vu d'ici la salle. On devine bien l'étage derrière le claustra, salle qui doit bénéficier ainsi d'un éclairage maximum et d'un beau plafond. Un rez-de-chaussée permet sans doute d'abriter les locaux techniques. Regardez comme l'escalier est judicieusement placé dans le plan. Cette belle carte postale est imprimée en Procédé 301 par Draeger pour Yvon. On notera que l'éditeur oublie l'un des deux architectes Mr Ringwald.
Pour finir :



Retour vertical sur la salle des fêtes. Sans doute un peu trop de végétation pour nous, les amateurs d'architecture ! La carte postale est bien plus récente et fut expédiée en 1986 ce qui prouve qu'encore la salle des fêtes de Saint-Dié savait faire événement dans la ville.

lundi 5 novembre 2012

Tetrodons à sauver !


Voilà bien un cas d’école !
Des Tetrodons jouent leur rôle depuis des années dans un V.V.F. à Lège Cap Ferret. Des amoureux de ce type d’architecture, des passionnés, des “connaisseurs” savent la valeur patrimoniale de ces petites constructions si marquées par les préoccupations de leur époque : mobilité, légèreté, modularité. Ces mêmes passionnés sous la menace de la destruction de ces Tetrodons s’organisent joyeusement sans colère, simplement pour sauver ces bâtiments de la destruction aveugle.
Des promesses sont faites, des ventes sont organisées.
Mais voilà...
Voilà que sous des prétextes étranges de déteriorations possibles du terrain par le déménagement de ces Tetrodons, ceux-là mêmes qui en ignoraient jusque-là la passion qu’ils soulèvent oublient soudainement les promesses et stoppent l’action de sauvegarde...
On croit rêver...
Pourtant les V.V.F furent à leur époque de grands soutiens et de grands commanditaires d'une architecture contemporaine de grande qualité. Il suffit de voir sur ce blog le nombre d'occasions que nous avons d'évoquer ce patrimoine. Il faut espérer que cela n'augure pas de massacres de cet héritage.
Une fois de plus, le combat patrimonial, la connaissance de l’histoire de l’architecture, la passion de citoyens vigilants à leur architecture seraient mis à mal par des ignorants soudainement éclairés et intéressés ?
Reste le Droit. 
Et nul doute que ce dernier et l’énergie des amateurs permettront enfin que, dans un jeu social apaisé, les promesses soient simplement tenues.
Le patrimoine architectural moderne et contemporain appartient à tout le monde mais surtout à ceux qui le vivent, l’aiment et le sauvent.
Le Comité de Vigilance Brutaliste reste à l’écoute de ce dossier et vous demande de soutenir cette action de sauvegarde.
Pour vous rappeler la forme et l’intelligence de ces petites constructions qui savaient ne pas être des mobile-homes affreux et des camping-cars dégueulasses qui envahissent nos horizons voici des extraits d’Architecture d’Aujourd’hui de juin-juillet 1972. C’est une référence et il suffit parfois de savoir lire pour savoir voir et aimer.
Rappelons donc que ces Tetrodons sont l’œuvre des architectes de l’A.U.A, de J. Berce, E. Ciriani, M. Corajoud, B. Huidobro, G. Loiseau, A. et J. Tribel. Le constructeur étant le Groupe Barbot.
le C.V.B.















samedi 3 novembre 2012

Retrouvailles ludiques

Revenons un peu à notre intérêt pour les aires de jeux, le plein air, les loisirs enfantins. Nous verrons que cela nous permettra de retrouver quelques amis et de découvrir quelques belles architectures.
D'abord à Fontenay-sous-bois :



La belle carte postale des éditions Raymon nous montre la ZUP et son centre commercial. On retrouve là toute la qualité de l'éditeur et du photographe J. N. Duchâteau que nous connaissons bien et avec lequel j'aimerais bien parler !
Mais que vise-t-il ? Se reculant au maximum pour embrasser à la fois les deux tours et son centre commercial, il installe également dans son cadre les très beaux jeux pour enfants qu'un autre photographe de cartes postales avait cadrés pour les éditions Yvon, rappelez-vous ici.





Cela permet de confirmer le beau travail de cadrage du premier photographe qui "invente" un rapprochement entre les immeubles et les jeux alors que Mr Duchâteau dans une sensibilité plus objective (oui c'est curieux !) donne à voir le lieu pour ce qu'il est. Mais... mais... on sait que les photographes parfois travaillent pour deux éditeurs différents. Et si Mr Duchâteau avait réalisé les deux clichés ?
Il semble que l'architecture de cette ZUP soit de Marcel Lods, sans certitude.
Et si on pédalait ?



Nous voici à Dunkerque devant le Casino. Au premier plan, les bambins font du karting à pédales, ce qui semble bien les réjouir ! A l'arrière la très belle structure du Casino mêlant briques et béton tendu se donne à voir. On aimera que cette structure dans sa forme constructive aurait pu être aussi bien une gare  ou un centre sportif. L'idée étant de couvrir une grande surface par une voûte. Il semble bien que cela ait disparu sous une restructuration du début des années 2000. Doit-on le regretter ? Oui. Et que sont devenus les petits karts ? Quel chemin ont-ils pris ? Il doit y avoir des centaines de photographies dans les albums familiaux du Nord, d'enfants au volant de ces bolides !





Sous la terre maintenant :



Voici une bien belle Boring Postcard !
Nous sommes à Lavaré (Sarthe) dans la colonie de vacances de Choisy-le-Roi par les éditions Combier. On passera sur les bungalows sans intérêt et sur le cadrage qui ne nous laisse comme point central que le malheureux tube de béton de tout-à-l'égoût recouvert de terre et qui sert de jeux...



Voilà bien un imaginaire de concepteur d'espaces d'aires de jeux bien pauvre qui a dû finalement retrouver la richesse d'invention enfantine capable de voir dans ce collecteur des eaux usées au choix une grotte au trésor, le ventre d'une baleine, un vaisseau spatial !
A ce souterrain d'une pauvreté qui fait sans doute sa grandeur nous préférerons cela :



Vous reconnaissez ? Allez... Oui !
Nous sommes sur un très beau spot de ce blog devant le V.V.F des pins de Cordouan à la Palmyre. Nous retrouvons le sous-marin et depuis ce point de vue je crois bien que nous voyons son entrée pour passer sous le sable ! Regardons également les autres détails de cette merveille du design des aires de jeux par le Group-Ludic.





Quelle merveille ! Il me faudra aller voir ce que tout cela est devenu !
On saluera également le monsieur qui regarde le photographe et donc nous regarde aussi. N'oublions pas que ce V.V.F doit aussi beaucoup à sa belle architecture moins lisible sur cette image.
Un autre V.V.F :
C'est écrit sur l'image !



En Corse nous retrouvons également deux centres d'intérêt. L'architecture d'abord avec ce qui semble bien être un travail intéressant qui fait songer au travail de messieurs Salier et Courtois en Gironde.



De gros contreforts de béton sur lesquels on pose une charpente et un toit de tôle. Mais je ne trouve aucune info sur ce V.V.F. Par contre, on retrouve nos jeux préférés de Aires et Volumes.



On les retrouve sur cette autre carte postale ce qui tente à prouver qu'ils faisaient "images" pour ce V.V.F. Merci de votre attention.




 

lundi 29 octobre 2012

Vichy au bord de l'eau et de la nuit

Depuis un moment des cartes postales de Vichy finissent par faire un petit paquet intéressant. Je vous propose donc une petite visite de cette ville au travers de quelques cartons 10x15cm. On verra que l'architecture y est belle et moderne.
Commençons fort :



Ce très beau bâtiment est en fait l'internat d'un "groupe technique" du lycée d'état de Vichy-Cusset. La carte postale Léo Lafont nous montre bien sa belle façade et les très jolis piliers qui dégagent les ouvertures. C'est sérieux mais bien dessiné et le correspondant indique au verso : " J'ai été plus sensible au charme de ce bâtiment qu'à celui de la ville, presque morte en cette période d'avant-saison. Voilà un internat dont nous nous contenterions n'est-pas ? " Tout est dit...
Mais la construction moderne de Vichy qu'on trouve le plus en carte postale est la Rotonde sur le Lac par l'architecte Marol. Et c'est bien normal tant cette construction a marqué les esprits par sa forme, son articulation particulière au lac et sa grande ouverture (quasi-totale) au paysage. C'est une sorte de machine à voir le paysage d'une grande élégance.
Regardons :



La carte postale Iris nomme bien l'architecte Marol et nous montre la Rotonde attachée par sa passerelle au quai. La sensation d'être à ras de l'eau pour les visiteurs est bien visible ici. On doit se croire sur un bateau !



L'autre carte Iris est plus "maritime" et accentue la valeur de loisirs nautiques de la construction en prenant le point de vue depuis le Lac et en laissant glisser le petit voilier. Mais d'ici la Rotonde semble un rien écrasée sur les quais, moins libre.
La dernière carte postale, toujours chez Iris, nous montre la Rotonde toute illuminée, de nuit, en faisant de son reflet un spectacle doré à la feuille !



Mais les lumières de la nuit donnent aussi beaucoup de qualité au quartier des Ailes à Vichy. Le logement social et ce quartier moderne, sans souci, trouvent dans les cartes postales un moyen d'expression de leur rôle urbain. La grande qualité photographique de ce cliché fait vibrer des bleus intenses contre des points lumineux. On accorde alors à ce type de quartier tout l'égard qu'il mérite et on en dégage une grande plasticité. Je n'ai pu trouver nulle part le nom du ou des architectes du quartier des Ailes.



On notera que le Yacht Club, la Rotonde donc, eut les honneurs d'un petit article dans le numéro de Février 1964 d'Architecture d'Aujourd'hui. Cela nous permet de relever une erreur d'attribution de l'architecte par l'éditeur des cartes postales qui indique L. Marol alors qu'il s'agit bien de Jean Marol que nous connaissons bien sur ce blog.

samedi 27 octobre 2012

Le Corbusier en vrac

Aujourd'hui quelques nouveautés corbuséennes arrivées dans la collection depuis peu. C'est un rien mélangé, mais quand c'est Le Corbusier on aime sans trop de condition. Et puis, est-ce ma faute si l'architecte a chanté l'angle droit pour finalement faire des carapaces de crabe ?
On commence ?



Cette très belle prise de vue aérienne par le service aviation de Combier nous montre Ronchamp et sa chapelle dans toute sa splendeur. Le point de vue nous permet de mieux saisir la forme tortueuse du toit mais une belle surprise est cachée sur cette carte postale. Regardez bien...
Alors ?



Oui ! Bien vu ! Le tas de planches du coffrage de notre chapelle reste visible, abandonné dans le bosquet ! On aimera ce fatras de lignes droites qui ont permis de réaliser le moulage des courbes de Ronchamp ! L'ultime vision du chantier avant son nettoyage nous permet de saisir la fabrication de la chapelle. On notera que Le Corbusier est nommé sur cette carte postale non datée malheureusement.
Encore depuis les airs :



















Nous sommes à Rezé au dessus de ce que l'éditeur Gaby nomme la cité "le Corbusier". On se demandera pourquoi il ne dit pas "Cité Radieuse"! Le cliché du photographe Heurtier nous permet de voir la ville de Rezé et l'implantation dans la presque campagne de la Cité Radieuse, souvent nommée Maison Radieuse à Rezé. L'objet architectural est bien isolé, seul dans son échelle et ses proportions. On imagine les enfants profitant encore de ces petits chemins verdoyants tout autour de la Cité. même si c'est un peu loin, on en profite tout de même aussi pour voir la différence de traitement du toit-terrasse avec la Cité Radieuse de Marseille.



En 1959 :



A. Caillon le photographe de cette carte postale éditée par les dominicains d'Eveux pour récolter des fonds pour soutenir l'œuvre de Le Corbusier a fait un beau cliché, une belle carte postale. La pente du terrain que rétablit à l'horizontale le couvent est bien marquée au premier plan. Elle forme un triangle sombre sur lequel le béton se pose. Les pilotis partent du haut vers le bas pour rejoindre une assise. Le contraste du noir et blanc fait chanter les vibrations des volumes sur la façade. Simplement une belle photographie.