lundi 14 septembre 2009

Hansjörg Schneider, un ami, un artiste berlinois

Berlin c'est une ville.
Mais c'est aussi une géographie d'amitiés.
Dans cette géographie il y a un point central : Hansjorg Schneider.
Claude et moi avions eu l'opportunité de montrer son remarquable travail pendant l'exposition "Persistante Perspective" au Mans.
Hansjörg était venu d'Allemagne, un gros rouleau sur sa voiture contenant une de ses œuvres : Un magnifique et gigantesque papier dont les fenêtres découpées dessinaient la tour Pirelli de Gio Ponti à Milan.
Présence uniquement visible donc grâce aux ouvertures du bâtiment découpées dans la blancheur du papier.
C'est un travail qu'il continue de pratiquer. Voyez les vues de son atelier. Reconnaissez-vous les architectures ?




Mais Hansjörg Schneider est aussi un collectionneur de cartes postales d'architecture.





Cartes postales qu'il n'hésite pas à découper minutieusement (et c'est peu dire) pour offrir là aussi des percées, des ouvertures et des géométries qui prouvent la pertinence de son regard à la fois sur les images mais aussi sur les lieux.



Sur des tourniquets, les cartes postales après leur opération reposent tranquillement laissant enfin passer la lumière et le regard.



Le dos des cartes se jouent alors d'un rapprochement avec ses grands découpages. Images à la fois abstraites et totalement liées au réel. La réduction ainsi de leurs formes tente de nous prouver que l'œil continue à les reconnaître et mieux à les relire avec une nouvelle distance souvent liée au va et vient entre les deux dimensions et la profondeur perspective. L'œil perce alors autant que la pointe du cutter.
J'ai jalousé sa collection et bien plus son travail.
Parfois, je retrouve des cartes postales que je possède, des lieux que j'aimerais visiter et bien pire des lieux et des cartes postales que j'aimerais découvrir.
L'accumulation aussi puissante est quasi insupportable pour l'amateur d'architecture et de cartes postales que je suis... J'aime beaucoup ça !


dimanche 13 septembre 2009

Berlin, Berlin

Bon.
Je suis de retour de Berlin.
Le silence d'une semaine c'est ça. Mon voyage.
Mes amis je ne sais par où commencer pour vous dire les merveilles attendues et bien là et les découvertes superbes que la ville semble posséder à n'en plus finir.
Des cartes postales plein la besace.
Des photographies numériques, des stéréoscopiques et des 110 au Pentax. Des images.

Comme pour beaucoup de villes, Berlin possède deux types de cartes postales d'architectures modernes. Celles vendues sur les tourniquets et qui représentent la ville telle qu'elle croit être et telle qu'elle est parfois, moderne, sauvagement changeante, incroyablement moderne. Puis la catégorie des cartes postales de musées, galeries et autres lieux culturels où le client comme moi est satisfait soit par des vues de bâtiments plus rares soit par des points de vue plus... artistiques et originaux.
J'ai toujours tendance à aimer la première catégorie, celle que Serge Daney cherchait en voyage pour comprendre comment la ville se donnait à voir mais je ne boude pas le plaisir des autres.
On peut aussi d'une manière bien cavalière faire la différence entre les deux catégories. Il y en a une (et c'est la première) à 50 centimes d'euros disponible partout et l'autre à 1 euro plus rare.

Je commencerai par une petite sélection de la première catégorie et je commencerai fort :



Un chef-d'œuvre attendu, rêvé, imaginé surtout depuis que j'avais découvert du même auteur celui de Copenhague. Le Musée Juif de Berlin par Daniel Libeskind.
L'une des plus belles peaux de bâtiment que je connaisse, une théâtralité pondérée et des espaces intérieurs invraisemblables de beauté déconstruite.
Un cheminent intérieur qui vous fait vaciller, les fonctions de l'oblique sous les yeux et les décors de Murnau évoqués. Un expressionnisme blanc dedans et froid métal dehors. Ne pas oublier les sols et leurs traitements graphiques. Le corps soumis à l'épreuve du dérobement.
Le pied cherche l'appui et les yeux ne tiennent plus l'horizon. Les contrastes appuyés entre lieux de recueillements clos et durs percés à peine de lignes lumineuses au rasoir contrastent avec la blancheur des murs que des coups de cutter géants ont obligeamment ouvert au jour. D'ailleurs y aller le soir tombant et laisser la nuit vous prendre.
Se souvenir.
La carte postale est une édition Skowronski et Koch qui ne donne pas le nom de l'architecte mais le nom du photographe monsieur Günter Schneider.


Du même photographe pour le même éditeur voici le dome du Reichtag par Norman Foster.
Bon.
Je ne sais pas. C'est un peu évident, un rien symbolique. Je ne vais pas bouder mon plaisir, l'ascension est superbe, la vue sur la ville remarquable et le cheminement qui vous mène d'un portique de sécurité de 50 cm de large à une coupole de verre au-dessus du fleuron de la pensée démocratique allemande ne manque certainement pas de sens architectural mais...
L'espèce de vortex vertigineux, syphon de lavabo Higth-Tech en dessous, tout de miroirs pour bien dire que le peuple c'est nous et que notre image est comme aspirée vers les députés en contrebas...
Les écailles de verre, le dessin de la structure, la qualité des matériaux non tout cela ne m'enthousiasme pas outre mesure. Oui on grimpe. Oui, en pente douce. Non on ne doit pas se croiser. Non. Deux escaliers indépendants nous en empêchent. Sûrement là aussi une image de la démocratie.
Mais comme vous pouvez le voir sur cette image la coupole est ouverte aux intempéries. Son oculus laisse la pluie et les étoiles passer au travers. Elle ne touche pas non plus le sol. En fait elle est plus un igloo à la Mario Merz qu'une coupole architecturale. Et là, il faut le dire c'est assez étonnant la suspension d'une telle masse.



Cette autre carte postale un peu plus rare nous montre la salle des députés allemands juste sous la coupole. Ils sont menacés en permanence donc par cette pointe provenant de celle-ci. Grande luminosité du lieu de la démocratie qui confère là aussi une idée de la transparence du jeu politique (c'est ouvert donc c'est justice). Pas d'ambiance feutrée à la française. Comme une immense salle des marchés libéraux, une salle des sports.
Sur cette image, j'aime beaucoup à l'extrême droite l'objectif d'un appareil photographique ce qui laisse penser que Peer Grimm n'a pu finalement prendre son cliché que depuis ce point de vue, celui du public. Regardez bien les codes couleur : les sièges des députés sont bleus, les sièges des visiteurs sont gris. Mais où est le drapeau européen ?



Une vue multiple un peu criarde nous montre les nouveaux horizons berlinois.
Là, pas grand chose à sauver. Je n'aimais pas le Sony Center vu sur une de mes cartes postales. Je ne l'aime toujours pas depuis ma visite. Pourtant la place centrale joue bien sont rôle de lieu de rencontre et sous le soleil écrasant, elle sait adoucir l'atmosphère et la détente y est propice pour peu qu'on aime les jets d'eau gringalets et les écrans géants pour grandes images.
Voici aussi comment se définit le panorama de la ville :



J'aime surtout sur cette carte postale Schöning voir au fond presque en bordure l'immense et magnifique I.C.C (en dessus du 11) et deviner la cité de Le Corbusier (juste sous le 12).
Mais Berlin m'apparut moins tassée.
Toujours chez Schöning éditeur voici la visite d'Alphonse Allais :



L'autre catégorie de cartes postales :

On retrouve le Reichtag. En noir et blanc par Ute et Bernd Eickemeyer. Il ne rentre pas dans le cadre, pas assez de recul sans doute sur la terrasse et un autre objectif aurait déformé les lignes. Seul un éclat blanc sur un pan de verre brise la monotonie grise du dôme. Les visiteurs donnent l'échelle. C'est immense.


Toujours en noir et blanc mais chez Net-Work Company cette fois, vous pouvez enfin voir l'intérieur de la coupole. On voit parfaitement l'entonnoir de miroirs, son pare-soleil à droite et les plans inclinés à gauche. La nuit le spectacle des ombres chinoise sous le verre est superbe.
L'architecte Norman Forster n'est toujours pas nommé...



Le Sony center en noir et blanc avec bord blanc. Le grand chic de la carte postale d'architecture.
On retrouve Ute et Bernd Eickermeyer photographes. Encore un truc pointu qui tombe des cieux. Ce morceau est assez beau, ce qui l'est beaucoup moins c'est l'enceinte de verre et d'acier bleu si typique des architectures grandiloquentes. Le point de vue accuse la chute de la pointe de métal qui sert de tenseur aux câbles des velums. Comme une fleur, une éolienne.
Toujours pas le nom de l'architecte qui est Helmut Jahn.


Je finirai avec cette dernière carte postale de Bernd et Ute Eickemeyer. On retrouve les trois immeubles de la carte postale couleur, les photographes choisissent de nous les montrer un peu en retrait d'une passerelle. Ils ne photographient pas depuis la passerelle et nous indiquent ainsi un point de vue sans le prendre à leur compte, faisant finalement de celui-ci un spectacle. Ce pas de côté est typique. Montrer LE point de vue bien plus que ce qu'il permet de voir...
On remarquera d'ailleurs qu'une femme y prend une photographie comme certainement beaucoup des visiteurs de ce lieu certainement constitué pour saisir ainsi la ville. Je n'ai pour ma part, pas eu l'occasion de l'arpenter.
Nous aurions, sauf erreur de ma part sur cette carte postale de gauche à droite : Messieurs Piano, Kollhoff et Jahn.





vendredi 4 septembre 2009

Jean Prouvé et Courchevel



C'est modeste, presque rien.
Nous sommes à Courchevel les pieds dans la neige en attendant l'office.
Il fallait pour l'hiver beaucoup de place et pour le reste de l'année un lieu plus intime.
Il fallait que cela soit modulable.
Il fallait une idée.
Il fallait Jean Prouvé.
La Chapelle de Notre-Dame de l'Assomption se voit ainsi munie d'un beau rideau de métal et de verre qui s'ouvre et se ferme au gré des nécessités des fidèles et de l'office.
La simplicité géniale et le décor de la montagne comme refuge pour le culte. Quoi de mieux ?
La carte postale Jansol nous donne le nom du groupement d'architectes : Architecte-Cabinet en montagne.
Il s'agit plus précisément de Pradelle Denys et Quinquet Philippe.
Dans un numéro important de Plaisir de France de mars 1960 qui vient de m'être offert par Marc Hamandjian artiste je trouve une image de la Chapelle pleine de monde.



Ce numéro pose la question en sa couverture : pour ou contre les églises modernes ?



Pour.
Absolument pour.
Reconnaissez-vous l'église en couverture ?

jeudi 3 septembre 2009

la rue


J'aime tout particulièrement cette carte postale.
Je vous explique.
Oui l'un des plus beaux bâtiments du siècle dernier y est représenté. Et c'est justement la place qu'il occupe dans cette carte postale qui me fait autant l'apprécier.
Presque une indifférence.
Le Centre Pompidou est là, dans la rue comme le reste.
Pas de regard tourné vers lui, pas plus signifiant que le reste de la ville. Même la couleur semble le mêler à la rue.
J'aime cette indifférence.
Il fait partie de la ville. Totalement.
Et puis une 2cv Citroën passe (5671 FW 92). Et le jaune de l'Opel (?) fait glisser l'œil sur la pancarte au beau logo de Monsieur Jean Widmer. Notre-Dame au fond, flou léger, semble immense et brutale !
Regardez comme elle écrase les immeubles hausmanniens !
C'est justice !
Je serai perpétuellement étonné de voir le Centre Pompidou. Toujours.
Et cette carte postale pourtant me dit à quel point il est dans la ville.
Une belle édition Chantal expédiée en 1991. Messieurs Piano et Rogers sont nommés.

finalement, Le Corbusier

C'est vrai que je vous montre relativement peu de cartes postales des œuvres de Le Corbusier.
Non point que j'en manque mais plus sûrement qu'une sorte d'évidence me pousse à penser que vous connaissez suffisamment son travail qui est, il est vrai, loin d'être inédit.
Il faudrait tout de même voir si des œuvres plus anciennes sont oui ou non représentées. La Cité Frugès par exemple.
Alors pour contrebalancer tout cela voici deux cartes postales d'une des œuvres les plus photographiées et éditées, la Cité Radieuse à Marseille.
Commençons.


Cette façade sud de la Cité Radieuse est assez inédite mais soulève plusieurs questions. Original en effet ce point de vue vertical pour un bâtiment en longueur qui nous dévoile le plus facilement sa grille que son pignon même si dans ce cas la grille s'y prolonge de manière implacable.
Une manière d'adoucir la brutalité de la masse en la faisant (oui Claude) fuir exagérément. On pourrait y voir ainsi comme une indépendance de cette façade qui semble se détacher comme un volume à part et faire bâtiment à elle seule. Je m'aperçois d'ailleurs de l'étonnant décrochement produit ici.
La Cité Radieuse est habitée car du linge sèche sur les balcons. Pourtant quelque chose me fait penser que peut-être le bâtiment n'est pas terminé. Ne devrait-on pas de cet endroit voir sur le toit les beaux volumes de l'école ou de la salle de sport ? Comment se fait-il qu'à ce point ils disparaissent écrasés par la fuite du volume ?
Mes amis photographes auront eux remarqué le flou très net (j'adore cette expression !) des derniers étages. La mise au point se barre alors que les lignes sont parfaitement corrigées et restent bien parallèles.
Ciel blanc uniforme et ombres ignorées finissent le cliché. La carte fut envoyée en 1961. Le Corbusier est nommé.
Nous voici sur le toit.



Les ombres ici s'accusent et les nuages arrivent vivifiant le vide des espaces.
Personne...
Personne pour aller et venir sur l'un des plus révolutionnaires espaces de l'architecture du vingtième siècle. Personne pour aller à la salle de sport, prendre le soleil, aller à l'école, marcher, courir.
Nous sommes à genoux sur ce sol, le photographe s'abaisse un peu. Certainement s'abrite-il du soleil dans l'ombre du parapet. (à gauche en bas de l'image). Je me rappelle avoir eu aussi ce geste là-haut.
On devine l'étendue du lieu grâce à une mise au point ici parfaite qui nous emmène au fond de l'image. Monsieur Xénakis n'est-il pas finalement le dessinateur de ce volume ?
Ces deux cartes postales sont éditées par "Voyagence" concessionnaire du service de visite, 31 la Canebière Marseille. Leur logo est un beau dessin.


Mais à quoi servait-il ? Visite pour se loger ? Pour visiter la maison du fada ? On notera l'appellation "unité d'habitation Le Corbusier ".
Il faudra répondre à ces questions.

mercredi 2 septembre 2009

une pétition nécessaire

Vous allez prendre deux minutes de votre temps et faire acte de soutien à la sauvegarde d'un remarquable bâtiment moderniste belge.
Vous allez signer la pétition ici :
Je vous rassure ça ne fait pas mal et c'est gratuit.
Et c'est bougrement utile et urgent.
Merci à tous.
Au fait, qui n'a pas encore envoyé sa carte postale pour le sauvetage de Sens ?
Qui ?
Je vous rassure ça ne fait pas mal et c'est gratuit.
Merci à tous.

lundi 31 août 2009

Jacques Simon, le jeu et l'enfant



Vous avez lu il y a peu des témoignages et des articles sur le Groupe Ludic.
Vous avez aussi vu des cartes postales.
Hier, donc j'ai eu la chance de trouver trois ouvrages de Jacques Simon qui nous donnent bien l'ambiance et surtout les enjeux de la création d'espaces ludiques en ville pour les enfants (et aussi les adultes).
Il faut dire que la richesse de l'ensemble est prodigieuse et bien éteinte de nos jours.
Voici par exemple une sorte de porte-folio de 1975 :
On ouvre et des planches photographiques évoquent des expérimentations ou des réalisations toutes plus étonnantes les unes que les autres.
L'ensemble est un petit chef-d'œuvre éditorial de bricolage, à l'image parfaite des propositions.
Découpes de photographies, dessins, écritures savantes et typographies inventives se mêlent pour générer un foisonnement un peu libertaire qui, je ne sais pourquoi m'évoque L'AN OI de Gébé.
C'est drôle, plein de joie de vivre et absolument pas pédant. Et surtout c'est savant.
Car il ne faut pas se tromper ce n'est pas non plus le bordel. Il s'agit d'observer les enfants de les suivre et de faire jeu avec eux. Le tout avec la délicatesse de savoir où commence la proposition et où elle doit se laisser porter par l'imagination enfantine.
D'une certaine manière c'est parfaitement sérieux !
Et puis, je l'avoue je plonge car je suis sur ces photographies. Je veux dire que je suis de ce groupe, je comprends d'où proviennent les idées et les manières du centre aéré Renault de mon enfance.
C'est un tel foisonnement que c'est difficile de tout vous montrer mais voici quelques exemples :










Dans la même veine et du même Jacques Simon en collaboration avec Marguerite Rouard.
On retrouve un peu les lieux du fascicule et la mise en page quoique plus sage est absolument remarquable. Un très beau livre, l'exemplaire est si frais et l'ensemble si rigoureux que j'ai eu du mal à croire à sa date d'édition : 1976 !
Je vous laisse admirer le soin de la composition et surtout la beauté et l'intelligence des réalisations car ici pas d'utopie tout cela a bien eu lieu.









Ces trois images ne vous rappellent rien ?
Rappelez-vous notre enthousiasme pour le quartier Reims Croix-Rouge et le légendaire centre commercial "La rafale" de messieurs Damery, Vetter et Weil. Rappelez-vous les amphithéâtres de la faculté de lettres et de droit de messieurs Dubard et Gaillarbois.
Eh bien nous y sommes.
On les devine bien au fond.
Lors de nos visites pour photographier la démolition stupide de "la rafale" nous n'avions déjà pas pu voir les magnifiques installations de Jacques Simon. Certainement que la négligence municipale avait là encore laissé cela se défaire.
On comprend pourquoi Daumal quitta la ville de Reims.
Mais les cartes postales nous aident aussi à retrouver les vrais monuments.
Voici:

Le ciel bleu et les nuages. Les bicyclettes sous l'eau fraîche de fleurs en couleur.
Une carte postale "la cigogne" sans date, vraiment sans date...
Mais où tout cela est-t-il passé ?
On peut se procurer les ouvrages de Monsieur Jacques Simon sur son site directement ici :