dimanche 27 septembre 2009

La belle politesse de la maison Gailhoustet


Disons qu'il y a des moments dans la vie où l'on traverse le miroir.
Samedi, vers 10h du matin je prenais ce chemin en suivant Jeanne Gailhoustet.
Elle m'a guidé avec beaucoup de générosité et avec amitié dans la ville d'Ivry-sur-Seine dessinée en grande partie par Renée Gailhoustet sa mère et bien entendu par Jean Renaudie dont j'ai déjà chanté mon admiration.
D'abord en haut de la tour Raspail viser le merveilleux panorama et l'accueil chaleureux de Areski Aoun qui y occupe un atelier logement. Monter sur le toit-terrasse c'est un moment extraordinaire. La ville y est superbe. Nous sommes alors dans un espace qui, à l'origine, était un grand atelier pour les enfants. Jeanne me raconte alors comment les enfants occupaient joyeusement l'espace, montant dans les étages comme dans les rues d'un village. Et son regret de la vue depuis ce lieu où elle passa une partie de son enfance.
Il est très difficile de dire à quel point ce lieu est incroyable. Seule l'expérience de la Cité Radieuse est équivalente même si ici l'espace est moins grand. C'est un espace d'émotion simple, celle des espaces ouverts : montagne mer avion et aussi jardin.
Nous redescendons laissant Areski et un arbre pour Renée. Vite allons voir chez Andrea Mueller un appartement dans les "Renaudie". Une fois de plus l'accueil est chaleureux. On m'explique tout, même les trous d'aération dans le châssis des fenêtres !
Les terrasses sont plantées et belles. Andrea m'indique que finalement si elle ne s'y installe pas réellement c'est simplement parce que les ouvertures sont si grandes qu'on a le sentiment même à l'intérieur d'être dehors, il suffit de faire coulisser les fenêtres et hop !
Le cheminement dans l'appartement pallie ce qui pourrait apparaître comme un manque d'espace. Certes les chambres sont petites mais l'agencement du plan produit des perspectives et des trajets toujours renouvelés. Partout la verdure et le silence aussi.
Il faut reconnaître que Andréa a su (elle est architecte) tirer un bon parti du logement en dégageant certaines cloisons. Vivre là...
Puis enfin le Liégat.
Visite cette fois d'un grand appartement-atelier qui devait à l'origine servir pour une activité artisanale ou de commerce. C'est immense, sur trois niveaux. J'essaie de me repérer, de trouver le plan vu dans les ouvrages et l'organisation par hexagones de Renée Gailhoustet. Mais je n'y arrive pas tant les formes paraissent libres, ouvertes.
A nouveau on circule, glisse et toujours on est surpris de saisir ici une terrasse, là un autre niveau un peu comme dans une maison de campagne. Bien loin de ma machine à habiter Phénix avec son couloir central et les pièces de chaque côté !
Là aussi la porte s'est ouverte très gentiment. On nous laisse regarder, on nous parle de sieste à hauteur d'herbe... Car, oui c'est une découverte pour moi, en fait le niveau du sol des appartements est très sensiblement en dessous (25 cm ?) du niveau des terrasses. Ce qui produit une marche assez haute pour y accéder et donc couché dans son lit, oui, l'œil glisse sur la végétation...
Puis enfin, Jeanne m'emmène vers l'appartement de Renée. C'est un moment toujours toujours à la fois émouvant et drôle lorsque on peut ainsi rencontrer des personnes qu'on ne connaît et admire que par photographies, textes ou même la voix.
On arrive par le niveau 1, niveau avec chambre et terrasse et il faut encore quelques marches pour trouver Renée qui nous reçoit.
C'est, pour moi, un beau moment.
Mais vite, on me met à l'aise. Vite on me fait comprendre qu'ici c'est simple. J'évoque ma lecture de l'excellent La Politesse des maisons (vous ne l'avez pas lu ? Mais dépêchez-vous !)
Nous nous asseyons à la grande table et nous discutons de quelques petites notes soulignées dans mon exemplaire.
Marcel Lods, Team 10, Faugeron, et Claude Parent.
Et puis le repas s'organise, les invités arrivent et nous dévorons un saumon entier, l'œil blafard finissant ainsi sa vie sous une décoration de fleurs dans une ambiance chaleureuse.
L'appartement de Renée est exactement comme la description qu'elle en fait dans le livre. Je suis étonné d'être là mais pas surpris des espaces que finalement je n'avais pas eu autant de mal à comprendre en regardant le plan. Oui, on retrouve bien là aussi cette sensation de longueur et de cheminement. Oui, partout l'appartement est entouré de terrasses ou de vues sur celles des voisins. On oublie totalement que nous sommes en ville, en banlieue parisienne. Partout des percées et des points de vue.
Le jardin est superbe. Sauvage et ordonné. Libre. J'oublie qu'il est le toit d'un appartement en dessous. Incroyable.
Mais il faut reprendre le train.
Je m'aperçois alors que je n'ai pas fait de photographies de ce moment. C'est bon signe. Pas le temps. Il y aura mieux à faire que de se plonger dans des clichés et il me faudra plonger dans mes souvenirs. C'est bien mieux.
Merci à Jeanne pour l'organisation sans faille de ma promenade, pour cette disponibilité. Merci encore aux habitants, tous heureux de montrer leurs lieux. Merci à Benedicte Chaljub pour son ouvrage.
Et Merci Renée pour votre gentillesse et simplicité et surtout, surtout pour votre travail remarquable. J'aime apprendre ainsi.
Et puis totalement par hasard, ce matin en allumant la radio, j'ai le plaisir de reconnaître votre voix dans l'émission vivre sa ville. http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/vivre_ville/
Une nouvelle fois, la chance nous est donnée de comprendre qu'il est possible de faire du logement social intelligent.
Je conseille à tous (vous me suivez les étudiants ?) de télécharger cette émission et de lire La Politesse des maisons.
Alors, je n'ai pas de cartes postales à mettre sur ce blog. Juste quelques photographies que voici mais c'est si simple de prendre le métro jusqu'à Ivry et d'ouvrir très grands les yeux.

La Politesse des maisons
Renée Gailhoustet, architecte
Bénédicte Chaljub
L'impensé
ACTE SUD
isbn 978-2-7427-8227-7
22 euros












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