dimanche 14 novembre 2010

Mario Botta mouvant



J'ai reçu cette semaine de notre correspondant à San Francisco, Rafael, une étrange carte postale.
Celle-ci présente la particularité d'être couverte d'un réseau de lentilles qui permet de voir deux images successivement en faisant bouger la carte postale.
On connaît ce système pour les cartes postales en relief, on appelle cela du réseau lenticulaire mais ici pas d'effet de ce genre juste deux images l'une après l'autre.
Le bâtiment n'est rien moins que le Musée d'Art Moderne de San Francisco, œuvre de Mario Botta que nous avons déjà vu sur ce blog pour la cathédrale d'Evry.
Ce musée est assez incroyable et reprend l'ensemble du vocabulaire de l'architecte : formes simples combinées et encastrées, variété des matériaux jouant de leurs couleurs.
On trouve toutes les images désirées sur le net.
Je vous rappelle l'excellent site de Rafael, Postales Inventadas qui, comme moi, s'amuse de la représentation de l'architecture moderne au travers des cartes postales. Et comme il est un peu plus à l'ouest, ses références et ses trouvailles sont bien différentes. Ainsi nous nous complétons parfaitement.
Alors allez ici aussi de temps en temps.
Et merci à lui pour cet envoi !

samedi 13 novembre 2010

André Wogenscky connu moins connu.

On trouve facilement des cartes postales de la Maison de la Culture de Grenoble de Monsieur Wogenscky. Cette œuvre a eu un grand retentissement et elle est devenue avec d'autres constructions de Grenoble le symbole du modernisme de cette ville autour des jeux olympiques de 1968.
Je vous propose cette version des éditions André :


L'éditeur nous informe bien sur le nom de l'architecte Monsieur Wogenscky et nous donne aussi des informations sur le négatif photographique : Kodak Ektachrome !
La carte fut expédiée en 1968.
On y voit parfaitement la Maison des Arts dans un point de vue assez commun mais qui révèle bien la belle construction très carrossée.
On se reportera à l'article pertinent de notre guide d'architecture contemporaine en France :


Mais certainement plus rare et moins connu dans l'œuvre de Monsieur Wogenscky on trouvera en cartes postales ce village vacances "les aludes" à la Garde-Freinet dans le Var.
Dans le paysage :


La carte postale Combier nous montre très bien comment Monsieur Wogenscky a réussi à jouer avec la topographie du lieu, comment il est parvenu de manière très délicate à installer son œuvre face au village.
Les toitures entièrement végétalisées permettent ce jeu d'apparition et de disparition de l'architecture sans céder au pastiche et même avec une certaine vigueur géométrique. Il place l'ensemble des petits pavillons sur la pente, les fait glisser doucement en un étagement qui suit la colline.
On retrouve ce travail sur cette carte postale :


La carte postale Combier nous offre ainsi la possibilité de voir en détail l'œuvre de Monsieur Wogenscky.
On reconnaît aussi certains aspects bien inspirés de Le Corbusier comme les voussures, le béton brut et la polychromie.
C'est beau, c'est franc et délicat en même temps.
On notera pour finir l'incapacité des éditeurs de cartes postales à trouver la bonne orthographe de Wogenscky écrit parfois avec un i parfois sans le c.
Qu'importe finalement, il nous reste beaucoup de belles œuvres à admirer et à vivre.

guide d'architecture contemporaine en France
Messieurs Amouroux, Crettol et Monnet
technic-union 1972

jeudi 11 novembre 2010

Rotterdam non attribuée

Voici un cas bien intéressant qui souligne encore l'effort pour faire parfois des cartes postales différentes qui lorgnent du côté de l'art.
Voici une carte postale de Rotterdam :

Alors ?
C'est beau non ce collage ?
Trois vues dont une d'un détail au centre, une parfaite dynamique du montage. On remarque comment la verticalité des arbres de l'image du haut joue avec les obliques de l'image en dessous, elle-même stabilisée par la toute première en bas, celle avec le sol.
Oh ce n'est pas grand-chose ce collage mais on sent bien là une envie, une tentative de faire autre chose.
Regardez aussi le choix des images, leurs largeurs respectives et les blancs laissés de gauche et de droite. Le tronc d'un arbre à droite vient parfaitement dans cette épaisseur. Subtil.


Mais j'ai un souci, il m'est difficile d'attribuer des architectes à ces constructions. Au dos figurent les indications suivantes : Phoenix-Serie, Architectuur van het nieuwe Rotterdam, Wolkenkrabbers rondom, Winkelcentrum lijnbaan.
A. Carré Rotterdam.
Pourrait-on penser qu'il s'agisse de l'œuvre de Van der Broek et Bakema ?
Mais plus amusant, sur une carte postale bien plus traditionnelle je retrouve le point de vue :


Cette fois on lit Rotterdam, Flats aan Karel, Doormanstraat.
Mais surtout on voit ces superbes immeubles parfaitement dessinés et si marqués.
Alors qui attribuera ces merveilles à leurs architectes ?

mardi 9 novembre 2010

Pierre Dufau pour de vrai (oui...)

Parce que finalement je croise assez régulièrement son œuvre au travers des cartes postales, je propose un petit récapitulatif du travail de Pierre Dufau.


Je commence par une carte postale absolument superbe et étonnante du Paris-Sheraton Hôtel.
Il s'agit bien d'une carte promotionnelle éditée par l'hôtel-même et certainement offerte aux clients venant ici chercher confort et luxe au milieu des années 70.
Au verso on lit : Le plus grand hôtel de la Rive Gauche, les pus belles chambres de Paris.
Rien que ça... et en anglais également !
Mais la photographie que l'on doit à un mystérieux Groupe MSP est surprenante :
Bleu, bleu, bleu.
Je ne sais pas quelle réalité cette image prend en compte mais le bâtiment est ainsi (il faut bien le dire) totalement magnifié comme se détachant du ciel, en faisant partie, et surgissant du fond de l'air d'une nuit tombante.
Le dessin aride et fermé presque secret de l'ensemble est encore accentué par ce traitement et il est à parier que la retouche de l'image fut un gros travail...
Mais quelle image ! Quelle qualité d'impression également !
Le bordel lumineux du bas de l'image qui fait penser à un temps de pose long qui contraste parfaitement avec la tranquillité radicale de l'hôtel un peu esseulé. L'hôtel affiche quatre étoiles, j'en donne autant pour la carte postale !
Partons pour Bordeaux :


Cette carte postale aux éditions Elcé nous montre la nouvelle Préfecture de la Gironde. Elle nous donne le nom de Pierre Dufau comme architecte mais associé ici avec Jean-Pierre Dacbert (?) dans une Association des Architectes Parisiens. Il s'agit bien plus sûrement de Jean-Pierre DaGbert ici mal orthographié par l'éditeur.
La construction semble un prisme pour les reflets de la ville. Il semble bien que ce goût pour l'effet miroir qui tente la fameuse intégration n'arrive pas ici à éradiquer la géométrie puissante de l'ensemble. Et même dans un jeu de reprises, les reflets les uns dans les autres font une mise en abîme de l'immeuble se reflétant dans lui-même et révèlent encore plus par les lignes croisées et les angles cette géométrie.
Ces brisures des reflets divers troublent la lecture du bâtiment et à la fois en font sa particularité.
La carte postale est d'un grand classicisme de cadrage, pas d'effet, la préfecture au centre dans une symétrie solide. Le creux sombre sous le bâtiment semble vouloir nous parler d'un travail de jonction très poussé entre le sol paysagé en jardin et gradins et la construction même.
Ce même travail :


Ici la carte postale Elcé nous montre le très beau travail de jardin à la base de la Préfecture, on reconnaît bien ce style de l'époque de sculpture intégrée faisant suite et prolongeant la construction. On connaît cela à la Grande Motte mais je pense aussi aux constructions de messieurs Andrault et Parat qui comportent à leur base le même type de jardin. Souvent d'ailleurs cela est maintenant totalement abîmé.
On voit ici un jeu de courbes, de vides, de plantations qui offrent un grand contraste avec la préfecture dont on devine ici dans ce tout petit détail en contre-jour la transparence.


Nous sommes dans le quartier Mériadeck de Bordeaux l'un des plus beaux ensembles sur dalle. L'éditeur nous donne bien encore le nom de Monsieur Dufau mais orthographie encore étrangement son associé en Bagdebert !
Reste encore un beau document montrant les qualités du travail paysagé et architectural d'une époque souvent à tort décriée.
Et encore :


Toujours la Préfecture de Bordeaux, cette fois dans une édition qui se veut artistique. Pour appuyer cette différence le photographe joue habilement des lignes et construit une image dont la composition met en avant une tonalité bleue grise et des lignes franches. Le photographe Michel Guillard est nommé et travaille pour IN' EDITE. Le nom même de cet éditeur dit son désir d'images exclusives se détachant de la production habituelle des cartes postales. Si on peut dire que le photographe a fait ici un beau travail, on regrettera l'énorme et disproportionné bord noir si conventionnel de l'image d'art qui finit par être un tic bien embêtant. La qualité de tirage de la carte postale est pourtant irréprochable et la matité lui apporte également une grande qualité et sert bien la belle image de Monsieur Guillard. Qui reconnaîtra le bâtiment reflété par celui de Monsieur Dufau ?
Les deux architectes sont parfaitement nommés au dos de cette carte postale sans date.
Au nord:


J'ai tout de suite aimé cette carte postale et donc la construction qu'elle présente. Nous sommes à Créteil devant son hôtel de ville. La carte postale Lyna pour Abeille-Cartes nous donne bien le nom de Pierre Dufau et nous indique également la hauteur de la construction : 75 m.
Comment ne pas être sensible à une architecture à la forme si appuyée qui sans complexe affiche son mode de construction ?
Comment ne pas voir ici une structure solide comme une pièce de génie civil habillée d'un voile de verre ?
Et les courbes donnent à l'ensemble la sensation d'un mouvement de rotation que le piéton doit faire fonctionner dans un cinétisme à échelle humaine.
C'est beau.
Cela me rappelle dans son concept constructif là aussi une œuvre de Messieurs Andrault et Parat : la Tour Totem. Est-ce juste ?
Le photographe ne peut s'empêcher de cadrer la croix de Lorraine dans l'image mettant en contraste sa solennité lourde et épuisante avec la puissance formelle de la construction de Monsieur Dufau.
L'architecture gagne à ce jeu et c'est tant mieux.

lundi 8 novembre 2010

courbe des riches, courbe des pauvres



Voyez comme l'image d'une carte postale permet de croire à la réalité de proximité de deux architectures.
Voyez comme une forme peut servir deux programmes, l'un de prestige, l'autre social.
Voyez comme le bord de mer offre l'indifférence à la forme alors que le sol du bassin parisien fait monter cette forme comme indésirable.
Je le répète il s'agit d'images car la vérité architecturale n'est évidemment pas aussi simple mais tout de même il est troublant qu'une courbe infinie génère luxe et volupté à Villeneuve-Loubet alors qu'à Gennevilliers on parlera de muraille de Chine.
Les deux architectures monstrueuses en un certain sens savent faire de cette beauté le point de leur intérêt.
Comme indifférentes à leur lieu, comme constituées d'une force propre, elles font le paysage, sont des falaises infranchissables.
Je les aime toutes les deux pour cela.
Mais j'aime, il me faut l'avouer, surtout leurs images. Je ne sais rien de leur vérité spatiale, de la vie qu'elles offrent.
J'imagine à Marina le ciel grand, l'horizon lointain et la construction dans le dos finalement comme un casier à balcons.
L'autre se veut égalitaire, pratique et moderne au sens d'un minimum commun de confort.
Le vent au pied des deux doit être le même et la mer apaisante de Marina Baie des Anges doit être à Gennevilliers remplacée par les voisins. Parfois la mer est calme, parfois elle est bruyante et tumultueuse...
Et comme le dit un habitant du Luth sur un site de la ville :

"Le bruit de l’autoroute toute proche nous donnait l’impression d’être au bord de la mer."

Alors j'apprends aussi que le Luth serait l'œuvre des architectes Auzolle et Zavaroni.
Monsieur Otello Zavaroni, architecte cela ne vous dit rien ?
C'est l'architecte de l'église de Foucarmont que nous avons vue ici.
Les architectes de Marina Baie des Anges sont messieurs Minangoy et Marot.

Villeneuve-Loubet Marina Baie des Anges, édition Y.P.A

Gennevilliers, Résidence du Luth, édition Lyna pour Brisset Presse Papeterie 1975

Gennevilliers- Le Luth édition Raymon.

dimanche 7 novembre 2010

le vide et le plein



Deux cartes postales pour parler de l'espace, dire que l'architecture dans tous ses aspects et même les plus triviaux est une question de plein et de vide, d'animation des espaces proposés à nos vies.
Dire que, de l'ennuyeux naît encore la fascination de l'attente de l'événement ou son achèvement.
Dire que la foule ne me rassure pas, que je compte les morts en tentant les généalogies de chacun.
Dire que le bruit de la foule rassemblée en un lieu est plus angoissante que son absence mais reconnaître en même temps que ce plein de corps peut avoir une chaleur.
Être en permanence dans cette balance entre la solitude d'un monde abandonné (donc entièrement à soi, donc avoir le pouvoir absolu) et la multitude d'un groupe qui permet la reconnaissance (narcissisme...)
Voir dans les motifs des chemises des hommes, dans ceux des robes des femmes, une époque et un statut social.
Les endimanchés font la fête joyeuse, un rien grasse. On aurait passé un bon moment et Yvette avait vraiment une bonne mine.
Jacquot nous a ramenés tous les trois, il a pris un café à la maison et il est reparti avec une boîte de six œufs.
On aurait évoqué le souvenir de Simone. Elle a bien souffert.
Et puis la musique aurait fait danser un peu une valse à Jacqueline et son petit fils Mathieu venu de Paris.
Les nappes blanches seraient tachées de vin bon marché. Les chaises de métal auraient rayé le carrelage.
Paul le serveur serait parti bien après tout le monde sur sa moto toute neuve. Il aurait accéléré un peu fort dans un virage. La roue arrière aurait décroché. Il serait resté là.
L'année suivante pas de doute que tous à nouveau réunis ici, son prénom aurait été prononcé dans des phrases au regret appuyé.
Il faut bien avoir une conversation.
Et personne, non personne ne se demanderait qui a pensé à la hauteur du plafond, à l'orientation des fenêtres, à la qualité du dessin des arcades. Personne.
Et l'une sur l'autre, les deux cartes postales ne diraient rien de plus que la fonction du mobilier et de l'architecture : accueillir des corps.


Nous étions à Tournehem-sur-le-Hem à la maison Bal-Meubles et parc d'attractions.
C'est entre Calais et St-Omer.
Il s'agit d'éditions de la maison Combier.

Non non je vous rassure, tout va bien...

samedi 6 novembre 2010

Sculpture et jeux, VVF de la Grande Motte

Voici encore une preuve du remarquable investissement des architectes des V.V.F (village, vacances, famille) à une certaine période de son histoire.
Nous verrons également que la sculpture traitée comme un lieu de jeux pour les enfants (à moins que cela ne soit l'inverse) fut aussi l'occasion de très belles interventions.
Nous serons encore à la Grande Motte qui par les cartes postales nous réserve encore et encore l'occasion de jubiler de ces réalisations.
Visitons :


Cette très belle carte postale du V.V.T et V.V.F de la Grande Motte nous montre bien ce travail sculptural étonnant des bassins et fontaines à l'entrée de la construction qui, elle-même, semble rassembler des qualités plastiques et formelles.
D'ailleurs les deux objets, sculpture et architecture jouent de leur opposition. L'architecture toute de lignes droites tendues et fortes, s'amusant d'étagement, soulignant les portées et offrant une circulation ombrée très lisible, s'accorde fort bien des volumes de briques rouges courbées, tordues en escaliers dont on ne sait si on peut vraiment les arpenter.
Cette fontaine est accueillante et d'une modestie formelle qui la rend parfaitement humaine, sensation certainement accentuée par les formes un rien zoomorphes.
La brique nous emmène aussi vers des objets familiers comme des puits et les fontaines des villages, et nous donne l'envie de nous y asseoir.
Et :


Nous sommes au même lieu mais cette fois devant la pataugeoire de la nursery.
Les enfants activent parfaitement le lieu fait d'un travail de courbes, de petites collines, de tunnels ouverts et d'une balançoire que l'on dirait sortie d'un dessin de Miro.


Des petites flaques artificielles offrent à loisir des occasions de se mouiller les fesses, de s'éclabousser.
Les briques enregistrent parfaitement l'eau qui s'échappe du bassin soulignant la vivacité des bambins.
On s'amusera des deux nurses et de leurs belles blouses.
Le petit train est garé là, attendant les bambins pour une promenade. La vie est belle...
On regardera également le très beau dessin du petit mur crépi de blanc.
Vraiment une belle carte postale des éditions Yvon en impression Draeger toujours de qualité.
Il faut aussi parfois rentrer :


Voici le bar du V.V.T.
Tout le jeu formel du mobilier rappelle la ville de la Grande Motte.
On regardera la solidité affirmée des sièges en bois et paille. Et malgré le vide de l'endroit devenu ocre orangé une silhouette féminine est piégée dans l'image.



Certainement une jeune mère heureuse de voir ses enfants libres dans les pataugeoires...
Nous devons ces belles sculptures-jeux à Michèle Goalard et Albert Marchais.

Mon frère Christophe ( merci !) m'apporte hier un numéro de la revue Parents de 1970. On y trouve un petit article bien pratique et intéressant pour nous, puisqu'il nous montre cette belle aire de jeux. Au delà des informations, cela prouve bien que ces lieux ont connu un succès éditorial et qu'ils étaient reconnus déjà à l'époque de leur création comme des éléments intéressants et modernes. On s'amuse que le manque d'herbe soit souligné comme une particularité et que, de jardin de crèche, devant son succès, il devienne jardin public ! Régalons-nous donc :